Patrimoine et Histoire de Champfromier
Par Ghislain Lancel |
La Bovine, son nom résume son domaine, était une "Société d'Assurance Mutuelle contre la Mortalité du Bétail", mais seulement pour les vaches, les génisses et les veaux. Elle fut créée à Champfromier en 1903. La "Prévoyante", fondée en 1904 avec les mêmes buts, fusionna avec la Bovine en 1918. C'est en 1924 que les statuts de la Bovine furent modifiés, introduisant une estimation pour chaque tête de bétail au lieu d'une valeur fixe.
Le presse locale et les registres de délibération font mention de la Bovine depuis ses débuts en 1903 jusqu'en 1944. Signalons une subvention de 750 francs par le Ministère de l'Agriculture, grâce à l'interbention de M. Chanal, en 1903 [L'Avenir Régional, du 11/09/1903].
Les carnets édités en 1924, après la modification des statuts, commencent par un Préambule historique :
"La Société d'Assurance Mutuelle contre la Mortalité du bétail, dénommée "LA BOVINE", fut créée à Champfromier en 1903. Une deuxième société ayant le même but fut créée l'année suivante, sous la dénomination de "LA PREVOYANTE", entre les propriétaires de la commune qui n'avaient pas adhéré à la première. Les deux sociétés, avec un nombre à peu près égal d'adhérents, fonctionnèrent parallèlement jusqu'en 1918. Cette année-là, les deux sociétés fusionnèrent et depuis, il n'a plus existé dans la commune qu'une seule société sous la dénomination primitive de "LA BOVINE", comprenant tous les propriétaires de la commune de Champfromier, sauf la section de la Combe-d'Evuaz. En 1923, la Société n'ayant pu remplacer son bureau démissionnaire, se trouvait menacée de disparaître, bon nombre de ses membres manifestant l'intention de se retirer, si l'on n'apportait pas dans le Société les réformes longtemps réclamées. [... une assemblée est convoquée en mairie le 13 janvier 1924...]
Il fut décidé d'un commun accord que pour établir plus de justice dans la Société, il fallait abandonner l'ancien mode de cotisations fixes par tête de bétail pour le remplacer par celui plus rationnel de la prime sur estimation préalable de chaque tête de bétail, payable à l'avance au tant pour cent sur le capital assuré, système adopté actuellement par toutes les Mutuelles-Bétail."
L'assemblée nomme ensuite les dix membres du Conseil d'administration, qui se constituent en bureau (avec Président, Secrétaire, etc., et tous les autres comme conseillers) : Coutier Félix (Président), Ducret Jules, Coudurier François (Vice-président), Coudurier Emile, Vallet Lucien, Tavernier François, Ducrest Jean (Secrétaire-trésorier), Ducret Claudius, Tournier Félix et Richerot Joannès.
Dans les nouveaux statuts de 1924, on pourra retenir ce qui suit.
Article premier. Le but de "LA BOVINE" est "la garantie mutuelle des pertes occasionnées à chacun de ses membres par la mort, les maladies ou les accidents quelconques qui peuvent survenir aux animaux de race bovine (vaches et génisses) qu'ils possèdent. Son siège social est à Champfromier". Les membres du conseil sont élus pour 3 ans.
Art. 2."Si le Président est du côté de Champfromier (rive droite), le Vice-président doit être pris du côté Monnetier (rive gauche) et vice-versa". Art. 6. Le bétail sera estimé deux fois par an, dans les premières quizaines de mars et de septembre, et le secrétaire recevra les primes du semestre. Art. 8. La société assure les veaux à partir de 3 mois et les vaches jusqu'à 15 ans. Art. 9. "Tout sociétaire est tenu d'assurer toutes les bêtes de son étable". Art. 10. Il n'y a pas d'indemnité en cas de guerre, émeute, incendie, écroulement de bâtiment, mauvais traitements, fautes graves. Art. 11. Les propriétaires qui font commerce de bétail ne sont pas admis. Art. 13 à 16. En cas de maladie, le sociétaire doit prévenir la Bovine, qui peut faire venir un vétérinaire, à ses frais, les médicaments restant au compte du sociétaire. Si il n'y a aucun espoir de guérison, la commission fera abattre la bête au plus tôt. Si la viande est reconnue bonne, elle sera distribuée au prix valant aux sociétaires. En cas de sinistre, la Société paye 80 % du capital assuré. Art. 25. Le fonctionnement des nouveaux statuts commencera le 1er mars 1924.
On a rajouté les dix membres du Conseil d'administration aux sociétaires afin d'obtenir la liste annoncée de 76 membres. Curieusement, Marius Ducret, cultivateur et maire de la commune n'est pas dans la liste ! Avait-il été oublié, sachant que Jules Ducret-Butte y est deux fois ?
Dans le tabeau ci-dessous, colonne du choix par ordre alphabétique, on a ajouté le numéro du Code d'Identité propre à tous les fichiers de ce site PHC.
Ordre de l'ouvrage | Ordre alphabétique | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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En 1924, Louis Chapelu, natif de Saint-Germain-de-Joux, demeure au Bordaz (actuelle maison Rosa), avec Marie Bornet, son épouse, et leurs deux enfants âgés de 11 et 7 ans. Il est un modeste "Propriétaire-cultivant", comme on dit dans les recensements de l'époque. Adhérant de la Bovine, son carnet porte le numéro 20.
De 1924 à 1926, ils ont deux vaches, dénommées "Charmante" et "Papillon", la seconde étant décrite comme rouge à queue coupée. On apprendra dans les pages suivantes que la première est de couleur froment à tête blanche. La valeur totale des deux vaches est de 2700 francs, pour une prime semestrielle à payer de 11 francs au premier semestre, puis de 13,50 francs à chaque autre trimestre. En 1927, ils acquièrent "Mignonne", une génisse de 15 mois, blanche avec une tache noire au flanc, estimée 1100 francs au second trimestre, pour 15,20 francs de prime. En 1928 le cheptel s'augmente d'une autre bête dite génisse, mais en fait d'un veau femelle âgé de 3 mois seulement (dont la mère est probablement Mignonne), "Bijou", blanche à tête blanche. Pour cette année 1928, la valeur totale des trois bêtes au premier trimestre est de 4700 francs pour 23,50 francs de prime, et celle des quatre animaux au second trimestre de 5200 francs pour 26 francs de cotisation. En 1929, Charmante et Papillon vont être à la limite d'âge, ayant chacune 14 ans, tandis que Mignonne est maintenant âgée de 4 ans et Bijou de 8 mois. Sans surprise, en 1930 et 1931 (dernière page de ce livret), les deux vaches ne pouvant plus être assurées, trop âgées, ne sont plus portées sur le carnet que Mignonne et Bijou.
On lira aussi, de nos jours avec un sourire, les notes manuscrites exploitant le moindre morceau de papier non imprimé où sont notés, sans trop de fautes d'orthographe mais avec des expressions que l'on pourra trouver crues, les dates auxquelles ses lapines, les femelles, étaient mises en présence d'un mâle et la date présumée des naissances qui devaient s'enssuivre : "Ma lapine a prix le 7 février 1942, elle va les faire le 7 mars" ; "Un mardi, mes deux lapines on prix le 23 février, elle vont les faire, les deux ensemble, le 23 mars" ; "Ma lapinne grisse à prix le 9 juin, elle va les faire le 9 juillet". On aura compris que la gestation d'une lapine est d'un mois (en fait 31/32 jours, parfois entre 29 et 35 jours).
Publication : Ghislain Lancel. Remerciements : Gilbert Blanc (carnet Chapelu)
Première publication le 24 décembre 2014. Dernière mise à jour de cette page, idem.