Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

Griller le café vert

Le café vert faisait partie des marchandises prisées qui furent longtemps rachetées aux contrebandiers du temps de la zone libre dont la commune était limitrophe. Puis les choses se normalisèrent, avec un commerce légal.

Café

Griller le café vert

Le grilloir à café de Clorinthe Bornet (1880-1970), épouse de Victor Ducret, négociant en bois et scieur au Pont-d'Enfer, est précieusement gardé par la famille. Resté inutilisé durant soixante ans, il a été ressorti, et fonctionne encore à merveille, ainsi qu'on pu le constater pour le plus grand bonheur des participants, dont trois générations d'héritiers. Et le plaisir olfactif du café que l'on grille est toujours aussi présent !

Depuis bien longtemps, jusque vers 1960, exception faite de la période de la Seconde Guerre, certaines familles de Champfromier recevaient la visite d’un marseillais qui leur proposait de l’huile en estragnon (un bidon rectangulaire) de 5, 10 ou 15 litres, du savon en barre (par caisse plate de 4 barres) à couper ensuite à volonté pour obtenir des savons individuels, et... du café vert en sac de jute. Commande faite, la livraison arrivait plus tard.

Pour griller le café, il faut d'abord du matériel en bon état, sans odeurs. Griller au préalable un peu de café moulu puis déposer un morceau sucre dans l'appareil pour absorber les odeurs, voilà qui achève la préparation du matériel quelques jours auparavant.

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Vient enfin le grand jour ! On sort l'appareil sur la pelouse, on fixe même une patte au sol pour en assurer la stabilité. Ensuite c'est la préparation des braises. Il faut du petit bois de sapin pour l'allumage puis du fayard pour obtenir de bonnes braises bien incandescentes. Une allumette, et le feu prend, ça fume et des flammes peuvent même sortir du haut du grilloir. En attendant la chauffe, on verse le café dans la boule, laquelle attendra encore 15 à 20 minutes, le temps d'avoir ces bonnes braises, clé de la réussite...

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Il n'y a plus de flammes, seulement des braises. C'est le moment d'introduire la boule dans le grilloir, sans oublier d'avoir fermé la trappe ! Il vaut mieux être deux, l'un qui soulève le couvercle avec un tisonnier, l'autre qui place la boule ! Ensuite on tourne la manivelle, on tourne, on tourne, sans jamais s'arrêter durant une dizaine de minutes. Et sinon, gare aux grains brûlés au bas de la boule ! On sort de temps en temps la boule brûlante pour vérifier l'avancement de la couleur du café. On fait glisser la trappe, aussi avec le tisonnier : c'est presque parfait, mais on remet la boule pour une minute ou deux...

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Cette fois c'est bon, le café est presque parfaitement grillé, on agite un peu la boule - il faut la santé - et la chaleur de la tôle termine la cuisson. D'ailleurs, on savait bien que le moment était venu, une savoureuse odeur du café venait de flotter dans l'atmosphère et de prévenir les voisins ! Il ne reste plus qu'à verser les grains sur une surface propre en les étalant sur toute la surface. On laissera refroidir une journée, puis les grains seront mis dans un bocal hermétique.

Jadis on grillait le café, entre une fois par semaine et une fois par mois selon la taille du grilloir, et la consommation ! C’est le plus souvent la grand-mère qui, assise, tournait la manivelle. Durant la guerre, faute de café, on grillait parfois de l'orge, comme qui dirait de la brioche et du pain noir !

Le café est grillé, il ne reste plus que le plaisir, le boire, en famille ou avec des amis.

 

Remerciements à Albert et Simone Avet qui ont accepté avec joie de ressortir leur grilloir et d'organiser avec talent cette séance de grillage de café vert (21 juillet 2010) . Crédit photographique : Ghislain Lancel.

Dernière mise à jour de cette page, le 22 juillet 2010.

 

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