Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

Coups-de-poing chez l'hôtelier, en 1729

 

De nos jours cela pourrait faire l'objet d'une info tournant en boucle sur une radio locale, ou du moins de commentaires dans les chaumières ! Le 23 janvier 1729, la neige est déjà présente, ou va faire son arrivée. Ainsi, à la mi-mars on verra que des bornes et limites ne pourront être posée à la Combe d'Evuaz que sitôt que la neige sera levée. En tous cas, au village, rien n'empêche que les hommes se retrouvent le soir à l'auberge pour boire un coup, ou un coup de trop ! Sur les 5 heures du soir, les frères Estienne [10389] et Joseph [9693] Goy-Michy, tous deux maîtres charpentiers de Champfromier, se retrouvent chez François Tournier [9375], l'hôte du village. Leur père est mort depuis quatre ans et ils envisagent le partage des meubles. Mais ils ne sont pas d'accord... Le ton monte, des paroles injurieuses sont échangées ! Entre alors dans l'auberge Joseph Bornet [10526], le beau-frère de Joseph Goy-Michy. Jeune homme âgé d'à peine 30 ans, il prend aussitôt fait et cause pour le mari de sa sœur Marie, et assène plusieurs coups-de-poing audit Estienne Michy et on peut même voir quelques "plaies" au visage.

L'affaire n'en reste pas là, l'agressé va porter plainte auprès des officiers de Montanges, et selon les procédures habituelles un procès devrait suivre, avec interventions d'un huissier, témoignages, rapports, etc., bref une bonne affaire susceptible de faire gagner de l'argent à l'ensemble de ces officiers et personnels de la paroisse voisine, ceux-ci en charge de la seigneurie ! Du coup notre victime et son agresseur se ravisent, et décident de terminer l'affaire devant le notaire, ce qui est fait, avec les excuses et prière à Joseph "de lui pardonner ces outrages et mal traitements", et versement de 10 livres pour frais engagés ! Fin de l'affaire.

 

Transcription

"[3E17444, f° 79] Traité et accord fait entre Estienne Goy-Michy de Champfromier d’une part et Joseph fils d’Henry Bornet dudit lieu, d’autre.

[f° 79] Il est ainsi que le 23 janvier 1729, Estienne Goy-Michy [10389], Me charpentier de Champfromier, étant dans la maison de François Tornier [9375], hôte audit lieu, sur les 5 heures du soir, avec Joseph Goy-Michy [9693], son frère, parlant de quelques différends qu’ils avoient ensemble touchant les partages de leurs meubles, au même instant Joseph [10526] fils d’Henry Bornet dudit lieu, entroit dans ladite maison dudit François Tornier, croyant que ledit Estienne Goy-Michy maltraitoit ledit Joseph Goy-Michy qui est son beau-frère [par sa sœur Marie] par violences, et se trouva outragé de quelques paroles injurieuses qu’iceux frères Michy se disaient l’un à l’autre, et dans le moment ledit Bornet donna plusieurs coups de poing audit Estienne Michy, et lui fit quelques plaies au visage, ce qui fut la cause qu’icelui Estienne Goy-Michy fit ses plaintes par-devant les officiers locaux de la Châtellenie de Montange, et en fit informer contre ledit Bornet, lesquels Bornet et Goy-Michy ayant fait réflexion aux grands frais qu’ils s’exposaient de souffrir, pour éviter l’événement d’un procès, qui leur seroit très [f° 80] dispendieux, et par l’entremise et conseil de leurs amis communs, et sous le bon plaisir de justice, ils ont traité et transigé de leurs différends comme s’en suit :

Et ce jourd’hui 7 février 1729, est comparu ledit Joseph Bornet, lequel a déclaré que, témérairement et comme mal avisé, il avoit battu et maltraité ledit Estienne Goy-Michy, et le prie de lui pardonner ces outrages et mal traitements, et de ne s’en souvenir plus, et promettant de ne plus récidiver, et ne lui faire jamais aucunes insultes, et moyennant ce, ledit Goy-Michy s’est désisté et départi comme il fait présentement, [f° 81] et ce moyennant 10 livres que ledit Bornet a présentement payé audit Estienne Goy-Michy pour pour remboursement de tous frais et dépens de la poursuite dudit procès.

Fait à Montange, dans la maison de Joseph Marcelin, lui présent, et François Nicollet de St-Germain son domestique, Claude Juilland-Claudon de Communal et François Goy-Michy [10456], cordonnier de Monnetier, témoins requis qui n’ont, ni les parties, signé, pour ne savoir de ce enquis, sauf ledit Marcelin [Signatures : Marcellin ; Maurier, notaire royal]". Fin de la transcription.

 

Publication : Ghislain Lancel. Source : AD01, 3E17444, f° 79 (Me Maurier, registre de 1729).

Première publication le 18 mars 2015 . Dernière mise à jour de cette page, idem.

 

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