Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

Famille Famy à Chézery

 

Plusieurs Famy sont encore très connus de nos jours dans le pays et leurs activités débordent largement du bassin bellegardien (Carrière de gravillons à Ballon, entreprise de travaux publics à Châtillon). Le patronyme fut bien présent à Chézery durant deux siècles, et on y compta 340 représentants (dont plus de 35 reconstitués) entre le début du XVIIsiècle et la fin du XVIIIsiècle. En 1608 les Famy étaient représentés à Chézery par 5 hommes répartis entre deux foyers (Bernard, Louis et François d'une part, et Pierre et Rolland d'autre part), tous portant le sobriquet de Muset, lequel s'est perdu par la suite. On sait seulement d'eux qu'ils possédaient des terres puisqu'à cette date ils faisaient la reconnaissance de leurs biens auprès de leur seigneur, l'abbé de Chézery. La principale branche des Muset donne l'impression de s'éteindre tristement. Jacques et Bernarde Mathieu n'avaient qu'un fils, Joseph. Mais depuis Noël 1691 on ne le trouvait plus. Ce n'est que le 12 août de l'année suivante que l'on fit la macabre découverte de son corps : "Corps mort et quasi tout pourri, trouvé au sommet de la montagne de l'Ebelley, que l'on croit être celui de Joseph (...), duquel on n'avait point eu de nouvelles dès quelques jours devant Noël proche passé". Cependant au rôle des tailles de 1697, ils sont encore quatre hommes mentionnés à porter le pseudonyme de Muset, tous étant de Forens. Si trois sont morts, Francoys, Jacques (probablement le père du Joseph évoqué précédemment) et Pierre, par contre un Claude est encore vivant. Les plus imposés sont les héritiers de Francoys (17 livres 16 sols) et ceux de Pierre (15 livres 3 sols), la moyenne des tailles étant de 7 livres 16 sols sur l'ensemble des 203 imposés de Chézery, pour la seule part de France. Des héritiers d'un (autre ?) Pierre sans sobriquet et d'encore un Pierre de La Rivière payent aussi une contribution (très modeste), le dernier Pierre étant un Famy/Pomard [AD01, C 668, f° 550v, 555v-556].

Parmi les Muset, on compte deux moines de l'abbaye y ayant vécu au XVsiècle, dont l'un, Roland, fut coupable de commerce charnel [G. Lancel, L'abbaye de Chézery, p. 301]. Mais ils ne portent pas le nom de Famy. Sont-ils de deux familles sans aucun lien, ou bien les Muset sont-ils devenus des Famy ? Les Muset (Famy-Muset) pourraient être originaires d'un village Musset ("au-dessus de Salex, comté de Bourgogne"), où l'on produisait des meules de moulin, et dont l'une était arrivée à Chézery en 1676 [G. Lancel, L'abbaye de Chézery, p. 211]. Une sous-branche des Muset de 2 individus est celle des Comtoz (la Comté ?).

Les autres pseudonymes Famy à Chézery sont presque inexistants : les Briole, Marchand (chacun un seul représentant), et les Pomard (2 représentants).

Une branche des Famy, les Gapian, s'installa aussi à Champfromier. Ils eurent parmi leurs membres notables un chirurgien, un horloger et un Maître menuisier, homme de l'art dont les plans furent suivis pour construire la flèche de la nouvelle église de la paroisse de Champfromier, reconstruite en 1825. Peu après la Révolution, un Famy fut maire, un court moment, puis François le fut aussi de 1803-1807. Un Famy habita la maison de la Caserne, ainsi qu'en atteste un linteau de bois à l'arrière de la maison portant encore l'année de sa construction : "1790 F FAMY".

Les Famy ne furent pas des casaniers et plusieurs d'entre eux furent des notables qui trouvèrent leurs épouses en dehors de Chézery, à Echallon (Demoiselle Rollet, fille du châtelain), à Arlod (Marie-Philiberte Audoz), ou même en Savoie (Madeleine Comte, de Bons-en-Chablais, 74890). C'est dire qu'ils voyagent, et qu'ils n'exercent évidemment pas que des activités agricoles. L'un d'eux eut même une éducation de très haut niveau Guillaume [CI-4641 de Chézery], praticien à Chézery, qualifié d'égrège en 1699 (une mention de diplômé très rare). Il fit un beau mariage en épousant Demoiselle Françoise Rollet d'Echallon. Leur fils François [CI-9439 de Champfromier], Me chirurgien est à l'origine de la souche Famy qui se développera à Champfromier.

Sieur Pierre-François, lui, fut à la pointe du progrès. Il était horloger en 1741 et devint Maître horloger à Chézery dès 1750 (en un lieu énigmatique, Fonex).

On ne sait pas si les Famy furent attirés à Chézery par la présence de l'abbaye, mais du moins plusieurs de leurs membres y tiendront quelques postes importants et auront les moyens d'intervenir dans des transactions. Le 12 juillet 1609, l'abergement du Pissoud (environ 5 hectares détachés de la Montagne des Moines à Forens) est accordé à Bernard, Loys et Francoys frères, enfants de feu Jehan Famy dit Muset [CI-7348], de Forens, moyennant l'introge (le prix principal) de 12 ducatons (84 florins).

En 1657, se situe l'épique épisode de l'arrivée des troupes de Mercœur, celui-ci venant se faire payer par la force d'une taxe dite du quartier d'hiver, pour un trimestre sur les deux hameaux français de La Rivière et de Lélex. François Famy dit Muset [CI-4246], est alors procureur de la paroisse de Forens. Il fait partie de ceux qui sont mandés et amenés de force à l'abbaye. Fils de Louys Famy dit Muset, du lieu de Forens en France, François est alors âgé d'environ 29 à 30 ans. Il est 2 heures du matin lorsque le sergent Saint-Onge vient le saisir dans sa maison, encadré par 50 mousquetaires. Ils l'emmènent ensuite avec le châtelain Faure jusqu'à la basse-cour de l'abbaye. Sous les menaces, et les débordements, l'arriéré sera payé dans l'après-midi et les troupes repartirons triomphalement, tambour battant ! [AD73, B0 7349].

Le 14 juillet 1664, Michel Crochon, directeur des affaires de l'abbé Duc délègue une partie de la gestion de la mense abbatiale à un tiers, en nommant le Sieur Nycollaz Famy [7347], son procureur, pour percevoir des restes dus, conformément aux rôles remis par Louis Faure, ci-devant économe [AD01, 3E17056, f° 116v]. Ce même Sr Nicolas Famy, désormais dit marchand, se voit ensuite accorder des privilèges montrant son rang. Ainsi sa fille Hélène, morte le 2 janvier 1676, âgée de 2 ans, est inhumée dans la chapelle Notre-Dame de l'église abbatiale.

En 1686, Bernard Famy, dit Muset, fils de "Pierte" de Forens, est l'hôte du Logis d'Amont.

A l'approche de la Révolution, c'est François Famy qui tient le bail de 700 livres des moulins banaux de l'abbaye, commencé le 1er mai 1789, et pour 9 ans. Bien mal lui en a pris. La Révolution lui maintient son bail mais la disparition de la banalité voit d'autre moulins se construire et les gens aller désormais faire moudre leur blé là où bon leur semble ! François Famy, marchand, n'est toutefois pas à plaindre, et il est encore considéré par les notables du pays. S'il n'est pas un fort en orthographe -- on le voit à la lecture de ses rapports -- par contre, il sait compter. C'est lui qui est choisi pour expert par les deux notaires soumissionnaires pour estimer la valeur de l'abbaye que les compères souhaitent alors acheter...

La famille profitera cependant des effets de la Révolution. En 1794, Joseph [CI-3678], fils de Joseph Famy, rachète une partie de Lalliex, un ancien pré de l'abbaye.

 

Quelques-uns des Famy les plus anciens, inédits, ont été mis sur Geneanet.

Source pour l'abbaye : Ghislain Lancel, L'abbaye de Chézery.

Publication : Ghislain Lancel

Première publication le 24 mars 2021. Dernière mise à jour de cette page, 04/05/2023.

 
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