Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL |
La famille Ducrest – avec un S – est bien connue à Champfromier, d'une part en référence à cette fameuse lettre S obtenue après demande officielle afin de la distinguer des nombreuses autres familles Ducret du village, et d'autre part par le souvenir d'Eloi Ducrest, l'ancien forgeron du village à la forte personnalité et dont l'activité rayonna jusqu'aux villages environnants. La carrière de son frère Pierre Ducrest se déroula à Lyon et fut poursuivie par ses descendants de telle sorte que la renommée et le savoir-faire de la famille Ducrest se perpétuent avec bonheur.
C'est Jean-Ambroise Ducrest, père d'Eloi, qui le premier avait rompu avec la tradition ancestrale de ce village qui voulait que presque tous les habitants soient cultivateurs. Néanmoins tout cultivateur était aussi menuisier et forgeron, voire maçon et charpentier, on faisait tout à la ferme. Au recensement de 1881, on trouve donc pour la première fois que Jean (Jean-Ambroise), 28 ans, est maréchal. Il s'est tout simplement spécialisé, habitant avec ses parents et son frère aîné, tous cultivateurs demeurant dans la maison familiale du Bordaz, un hameau surplombant le village. Dès lors la passion pour le travail du fer va se poursuivre, se spécialiser et se transmettre, de père en fils. Jean est indifféremment dit "charron-forgeur" en 1886, charron en 1891, forgeron en 1896, maréchal en 1901. En 1906, une étape est franchie. Jean déménage pour le quartier du Pont-d'Enfer, le centre actif du village où se trouvent aussi les scieries, la mairie et les écoles, et devient "Maréchal, charron, serrurier". Ses fils Eloi et Pierre (19 ans et 16 ans), sont serruriers pour le compte de leur père. Peu de changement en 1911. Et au sortir de la guerre, ne se trouve plus à Champfromier qu'Eloi (sa femme et leur fille), lequel a repris l'entreprise familiale à son compte, en tant que patron charron-forgeron. Sa sœur Zoé a épousé Antonin Pochet, un homme de Giron, qui sera à la tête d'une grosse entreprise d'exploitation de bois, de la coupe au transport (avec les fameux Nash-Quad américains, carrossés par Eloi).
Quant à Pierre, formé serrurier chez son père, il débute une brillante carrière à Lyon, au 4 Rue des Forces.
En 1914, Pierre habite déjà Lyon, au 96 rue des Charmettes. Il y passe avec succès son permis de conduire "de tous véhicules à pétrole". La guerre éclate. Infirmier, il collecte le mercure des thermomètres cassés ! La famille possède d'ailleurs encore un flacon de 400 gr de ce mercure datant de la guerre 1914/18. En 1923 il reprend l'entreprise Tarcens, rue des Forces à Lyon. Sa carte de visite précise ses activités : Serrurerie-Coffres-forts. Il épouse Louise Chapuis en 1927 et ont un fils Jean (né en 1928) mais Pierre décède quelques années plus tard, en 1935. Louise se remarie alors avec Charles Pellet et ils assureront la gérance de l'entreprise jusqu'à la reprise par Jean Ducrest (époux de Paule Bajard) en 1951. Le couple aura trois enfants, c'est Pierre-Yves Ducrest qui reprend la succession en 1989 et qui dirige actuellement l'entreprise. Ducrest rue des Forces est distributeur de la prestigieuse marque FICHET, tout en se diversifiant considérablement : serrure, blindage, alarme, télésurveillance, rideaux, etc. (2009).
Voir : un comparatif historique Fichet/Ducrest (en pdf) ; le site web commercial Ducrest.
La rue des Forces fut "rebaptisée" Rue Jean Ducrest par le voisinage, lors d'une réception mémorable le 25 juin 1990. C'était pour fêter le départ en retraite de Jean, cessation de direction qui avait eu lieu le 30 septembre 1989, jour anniversaire de ses 61ans. La plaque fut "inaugurée" en grande pompe, puis disparu quelques mois plus tard. Il n'y avait eu bien sûr rien d'officiel à cette sympathique plaisanterie !
Remerciements : Pierre-Yves Ducrest (Lyon).
Dernière mise à jour de cette page, le 10 juin 2009