Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL |
La première visite pastorale de Champfromier date de 1411. A cette époque, Champfromier faisait partie du diocèse de Genève, et était soumis à la juridiction de son évêque. On sait que les visites furent effectuées par l'évêque Jean de Bertrand, "homme plein de science et de zèle", et qu'il entendait remédier au "relâchement de la discipline" de ses prêtres.
La visite eut lieu le lundi 25 mai 1411. On note que le nom du curé n'y est pas désigné, et qu'il n'est pas présent, étant parti à la Cour de Rome (et non à la Papauté d'Avignon), sans autorisation, depuis la Saint-Michel... Il lui est enjoint que dès son retour il ne s'absente plus. Le vicaire est dénommé, Humbert Barrachin, mais il n'a pas été présenté (proposé par le seigneur) ni institué (accepté par l'évêque). Il manque l'huile pour donner l'extrême onction aux malades (à se procurer sous 8 jours), et une armoire avec serrure et clé pour y garder l'eucharistie (à réaliser dans le mois et à placer dans le chœur, à payer par le curé ou les paroissiens). Naturellement une église est construite, et elle est au vocable de Saint Martin, mais les paroissiens, c'est leur seul défaut, n'en ont pas encore de représentation. Aussi il leur revient de faire réaliser une "image" du saint avant une année.
Le même jour la visite se poursuit à Montanges, où les curé, vicaire et paroissiens sont jugés de "bonne vie". Par contre une belle liste d'objets liturgiques est manquante dans l'église (nappes, croix, chandeliers, etc.), ce qui signifie que ces reproches ne s'appliquaient pas à Champfromier. Le lendemain l'évêque se rendra à Echallon.
"Champfromier.
Le même jour, l'évêque a visité l'église paroissiale de Champfromier ; le curé n'y réside pas, mais se trouve à la Curie romaine depuis la Saint-Michel. A sa place, la paroisse est desservie par Humbert Barrachin, prêtre, assez convenable, mais avec des défauts : premièrement, il n'a pas été présenté à l'évêque, ni institué pour diriger cette église ; il n'a pas l'huile pour les malades et ne tient pas l'Eucharistie sous clef. Pour ces défauts à réparer, il lui est enjoint de les notifier à son curé dès son retour de la Curie et de lui signifier, à la place de l'évêque, de résider dès lors dans son église ; s'il a un motif pour ne pas résider, il devra se rendre auprès de l'évêque pour obtenir une autorisation, ce motif étant déclaré. Quant au vicaire, il se rendra aussi auprès de l'évêque pour sa présentation et son institution pendant l'absence du curé ou la durée de l'autorisation accordée. Si le curé, après son retour, ne réside pas ou néglige de demander la permission de ne pas résider, il est enjoint au vicaire d'en informer immédiatement l'évêque et de ne plus desservir l’église au nom de ce curé.
Il devra se procurer d'ici huit jours l`huile destinée aux malades. D'ici un mois, il fera faire, aux dépens du curé ou des paroissiens, une armoire dans le chœur de l’église près de l'autel munie d'une serrure et d'une clef pour la conservation de la très sainte Eucharistie.
A la charge des paroissiens, un seul défaut a été trouvé, le manque de l'image de saint Martin confesseur, vénéré comme patron dans cette église, injonction a été faite aux paroissiens, présents et entendants de faire faire cette image dans le délai d'une année. Nycod Festi."
[f° 3v] "Apud Champfrumier.
Eadem die visitavit dictus dominus episcopus parrochialem ecclesiam de Cha(m)pfrumier,
in qua non residet curatus, sed esse asseritur (asserens) et stetisse, a festo
sancti Michaelis citra, in Romana curia. Pro eo vero servit ibi dognus (dominus). Hu(m)bertus
Barrachin, presbiter satis ydoneus, patiens tamen hos deffectus :
primo quod non fuit nec est ad regimen dicte ecclesie presentatus nec institutus ;
[f° 4] item
non habet oleum infirmorum nec tenet eucaristiam sub custodia clavis ; super
quibus deffectibus reparandis fuit sibi injunctum quatenus notificet dicto curato
magistro suo, statim post ejus reventum (reversionem) de curia et precipiat vice
dicti domini episcopi, quod ex tunc resideat in dicta sua ecclesia, vel si causam
habeat ibidem non residendi, veniat at ipsum dominum pro licentia inde obtinenda,
causa hujusmodi cognita ; et tunc dictus vicarius etiam veniat presentandus
(presentendo) et instituendus (instituendo) per tempus dicte absentie seu licentie.
Quod si forte curatus predictus non residere, vel licentiam non residendi peteret (poterit) obtinere post ejus reventum (reversionem) supradictum neglexerit, injunctum est dicto vicario quatenus dicti curati negligentiam statim predicto domino nostro notificet et ex tunc in dicta ecclesia pro dicto curato non serviat ; item, quod infra octo dies habeat oleum infirmorum ; item quod infra mensem fecerit fieri, expensis dicti curati, vel parrochianorum, si sua intersit, unum armatrium (armatorium) in choro dicte ecclesie prope altare cum sera et clavi pro custodia sacrosancte eucaristie ibidem reponende (reposite).
Circa parrochianos repertus est deffectus solus videlicet ymaginis beati Martini confessoris qui in eadem ecclesia collitur ut patronus ; super quaquidem ymagine fienda infra annum, facta fuit dictis parrochianis (injunctio) presentibus et audientibus inunctio. Nycodus Festi."
Pour info, les visites de Montanges et d'Echallon font suite.
Source : AEG (Genève), titres et droits Ad1, f° 3v (Microfilm AD74, 1Mi8). Copie en Arch. diocésaines (à Bourg), Ev. de Belley-Ars, 470, Alloing 18 (avec compléments ou variantes entre prenthèses), suivi de la visite d'Echallon.
Voir aussi : Les visites pastorales du diocèse de Genève par l'évêque Jean de Bertrand (1411-1414), présentées et traduites par Louis Binz, de Genève (pp. 13-14), d'après les originaux. Mention dans les Mém. Acad. Salés., t. XXVII (1904), p. 195. Mention dans l'Histoire de Champfromier (résumé succinct pp. 25-26).
Publication : Ghislain Lancel.
Première publication le 12 février 2014. Dernière mise à jour de cette page, idem.