Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

Liens en fil de fer pour les bottes de foin

 

Jadis les liens pour les bottes de blés étaient en tiges de bois souple, ou en paille. Vint ensuite, à Champfromier, l'époque de la quincaillerie d'Eloi Ducrest et des liens en fil de fer. Ces liens étaient évidemment coûteux mais ils permettaient de gagner du temps et, redressés chaque année après usage, ils pouvaient servir longtemps. Et quand ils cassaient, on refaisait un nœud, ou même un simple coude, et le lien reprenait de l'usage... Ces bottes de blé liées, faciles à transporter, étaient amenées à la ferme, et le grand jour arrivait où la batteuse séparait la graine nourricière de la paille. Et puis vers 1965, les moissonneuses-batteuses firent leur apparition dans les champs de Champfromier, réalisant sur place et instantanément toutes les opérations depuis la coupe jusqu'à la mise en sac du blé. Dès lors il n'y eut plus de gerbe de blés, ni non plus de lien. Cinquante ans après, il n'y a plus aucune parcelle de blé, ni d'aucune céréale, sur le territoire de la commune, mais l'on conserve encore les vieux outils et la nostalgie. C'est au proche village de Confort, où le blé est encore cultivé pour sa paille d'excellente qualité pour la litière des bovins et le grain vendu pour une farine alimentaire, que nous avons pu refaire les gestes du passé et lier une botte avec un lien de fer...

Une reconstitution en 2010 des gestes qui prirent fin en 1965...


Le matériel se compose d'une robuste "aiguille" et de liens en fer

 
Les liens se terminent par deux boucles, l'une étant de petite taille (photo de gauche, boucle du bas). D'un geste de la main de gauche à droite, celle-ci sera poussée jusqu'au fond de l'ergot pointu soudé à l'intérieur à l'aiguille (voir la photo de droite où la petite boucle a été introduite par la gauche autour de l'ergot et se retrouve maintenant bloquée au fond à droite, un autre lien étant posé à côté pour comparaison). La boucle de plus grande dimension, située à l'autre extrémité du lien (photo de gauche, en haut), passera autour de l'aiguille.

  
Les outils sont prêts, le blé est à point, c'est le moment de le couper, à la faux, naturellement ! Ensuite on rassemble une javelle, il en faudra plusieurs pour obtenir une belle gerbe. Le lien est fixé dans l'aiguille.

  
On glisse l'aiguille et son lien de fer sous la botte. On ressort l'aiguille de l'autre côté et l'on attrape l'autre bout du lien de la main gauche pour en enfiler sa grande boucle autour de l'aiguille et la faire coulisser tout au long de cette aiguille.

  
On tire sur l'aiguille et en même temps on tasse la gerbe avec le pied. C'est presque fini, la botte de blé est bien serrée dans son lien de fer. Il ne reste plus, d'un coup sec, qu'à repousser la grosse aiguille vers le bas. Cette opération produit un double effet, d'abord torde le fil de fer encore attaché à l'ergot vers le bas et ainsi l'empêcher de sortir de la grande boucle. L'autre effet est de désengager le lien de l'aiguille en libérant la petite boucle de l'ergot qui est poussé vers le bas. Cette pliure rudimentaire du fil de fer au niveau de la grande boucle s'avère bien suffisante pour que le lien ne se défasse pas et que la gerbe reste enserrée. Par ailleurs au moment du battage, un simple geste contraire, ouvrant le fil de fer, libère la gerbe de blé. Plus tard, il reviendra aux enfants de redresser parfaitement le fil pour un nouvel usage, l'année suivante...

 

Œuvre d'art éphémère, nostalgie du passé, la gerbe de blé trône dans la salle à manger. On dit qu'elle y est du plus bel effet !

 

 

Remerciements à Claude Bonnin et son épouse (Confort) qui, bien que l'année 2010 fut pleine de promesse et se soit finalement révélée catastrophique pour la récolte du blé, ont accueillis le projet avec générosité et permis la prise des clichés, entre deux averses.... Merci aussi à Gilbert Blanc, qui avait gardé les éléments matériels nécessaires à la confection de ces liens ainsi que le savoir-faire du temps de son enfance, au service de cette reconstitution. Crédit photographique : G. Lancel (24 juillet 2010).

Dernière mise à jour de cette page, le 27 juillet 2010.

 

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