Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL |
Quelle différence y-a-t'il entre le fait de disposer à Champfromier d'un cheval venant de Bellecombe (Jura), en 1696 ou aujourd'hui ? Roland Durafoug, un natif de Chézery demeurant à la Combe d'Evuaz le savait certainement, mais ça lui coûta très cher !
"Le 27 octobre dernier [1696], les brigadiers et gardes [du Roi] établis au poste d’Echallon, lui saisirent dans sa maison une jument mentionnée et désignée au [procès]-verbal desdits gardes dudit jour, laquelle jument il l’avait empruntée de Louis Gros-Tabussiaz son beau-frère qui demeure rière la comté de Bourgogne à Bellecombe, reconnaissant l’avoir passée en France sans l’avoir déclarée au bureau de Châtillon, le plus proche, ni payé les droits d’entrée..."
Pour récupérer sa jument et éviter une amende, il se voit obligé à des tractations avec les représentants du Roi, et à se rendre à St-Germain à passer devant un notaire (Me Perrin), officialiser l'accord et obtenir une quittance de son versement : "à ces causes, il a été conseillé pour éviter la confiscation de ladite jument, de prier comme il fait le Sieur Jacques Passerat, receveur pour le Roi au bureau de Châtillon, agissant pour et au nom de Monsieur Maurier, Conseiller du Roi, contrôleur général des gabelles de Lyonnais au département de Bugey, Valromey et Gex, de lui vouloir accorder la mainlevée de ladite jument et vouloir se contenter de la somme de 24 livres qu’il offre lui payer pour tenir lieu de l’amende", ce qu’il a accordé, et ledit Durafour lui a présentement payé les 24 livres qu’il a "emboursé" [3E3890, f° 129 (26 novembre 1696)] .
La différence entre la situation administrative en 1696 et de nos jours c'est que Bellecombe n'était pas en France, mais en Bourgogne, et que toute "marchandise" transitant d'un pays à l'autre était redevable d'une taxe d'entrée. A moins qu'un malveillant ait dénoncé ce Pilliard qui n'était pas vraiment de Champfromier, il est plus probable que les gardes du Roi s'en soient préoccupés eux-mêmes, les chevaux étant alors des bêtes témoignant d'une certaine richesse, voire de prestige, puisque depuis 1686 environ un étalon royal était placé à Champfromier.
Un autre cas de saisie est connu, mais sans que l'on en sache précisément la raison, probablement un litige dont on attendra la décision de justice. "Jean [9003 (Goy-Michy)] fils de feu Claude Michy, laboureur de Champfromier (a rapporté) que les gardes au poste de Montanges lui saisirent, le jour d’hier, un poulain âgé de deux ans, au poil rouge-bai, lequel ils ont mis en pâture dans la maison du Sieur Louis Passerat, receveur pour le Roi au bureau de Châtillon. C’est pourquoi, pour éviter les frais de pâture, icelui Michy a prié Estienne Truchet [8978], maréchal dudit lieu, de bien vouloir être sa caution (...) La valeur en est de la somme de 96 livres, suivant l’estimation qui en a été faite en présence dudit Sieur Passerat et dudit garde ; et moyennement ce présent cautionnement, ledit Sieur Passerat consent que ledit Michy retire ledit poulain, à la charge de par ledit Truchet de le présenter quand il en sera requis, ou par sa valeur" L'affaire est sérieuse, la somme engagée est importante (le prix de trois vaches), et, comme à son habitude dans bien des affaires financières, Jean-Baptiste Rollet, curé de Champfromier, est témoin [3E3890, f° 78 (18 juillet 1697)].
Remerciements : Cédric Mottier.
Dernière mise à jour de cette page, le 16 septembre 2008.