Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

Mémoire de l'intendant Bouchu (1666-69)

 

A la demande de Colbert, un vaste état des biens et dettes des communautés fut engagé. L'intendant Bouchu réalisa ce travail pour l'intendance de Bourgogne, entre 1666 et 1669 (décembre 1666 pour Champfromier), et consigna le résultat des enquêtes sous forme de 9 volumineux volumes in-folio faisant 7800 pages. Pour Champfromier, Bailliage de Belley, on peut lire la synthèse aux Archives Départementales de la Côte-d'Or.

Cette synthèse est intéressante, mais n'est qu'une peau de chagrin par rapport au procès-verbal initial (13 pages), auquel on se reportera impérativement, pour plus de précisions !

Chanfournier !

Inutile de chercher Champfromier dans l'ordre alphabétique, on le trouve à Chanfournier !

Bien que l'idée de cette enquête soit d'avoir une estimation des biens et dettes des communautés du royaume, pour Champfromier on dispose ainsi effectivement de ces chiffres, mais aussi de compléments sur l'état de la paroisse peu avant 1670 : Une dizaine de propriétaires extérieurs à la paroisse font exploiter leurs terres à la Combe d'Evuaz, on cultive environ 100 journaux de terre, on sème du froment, de l'orge et de l'avoine, il n'y a pas de vigne, on compte environ 10 hectares de pré. Le bois appartient au prieur de Nantua. Il n'y a plus que 80 habitants (lire : feux ?), les particuliers, pauvres, sont encore sous le coup des maisons brûlées lors de la guerre avec la Bourgogne, il y a de l'ordre de 70 hectares de communaux mais Monnetier en a vendu pour 400 livres une dizaine d'années auparavant et il ne servent que pour le "champoy" des chèvres, etc.

 

Ce questionnaire comprend quatorze demandes imprimées, en face desquelles sont inscrites les réponses. Voici le détail des questions (résumées) et les réponses (intégrales), telles qu'elles sont écrites, pour "Chanfournier" :

I - Le nom de la paroisse et de ses dépendances :  La parroisse est Chanfournier. Les hameaux : Monetiers, Communal et Giron [-Devant]. Il y a dix métairies possédées par des habitans [demeurant] hors de lad. parroisse ; s'appellent en la Combe des Vouaz.

II - Les circonscriptions religieuses et administratives dont elle relève : De l'Evesché de Genève, du Bailliage de Bugey, du Grenier à sel de Nantuaz, de la recepte de Belley.

III - Le nom du seigneur, qualités, facultés, mœurs et emplois : Le Sr Prieur de Nantuaz, seigneur haut justicier de lad. Parroisse se nomme Tanneguy de Massac, de Paris. L'on dit qu'il a VIc l [600 livres] de revenu aud. Nantuaz et qu'il est chanoine à Orléans. L'on ne scait ses mœurs en lad. parr(oisse). Il s'occupe à une multiplicité de procès qu'il a.

IV - Le titre de la seigneurie, son degré de justice : Relève en toute justice, en main morte et tailliabilitez dud. Sieur Prieur Religieux de Nantuaz. Simple seigneurie.

V - Son revenu, l'étendue du finage, son commerce et s'il y a une rivière, son nom, un pont, un passage : La situation est entre des montagnes, rochers et Bro(u)ssailles. L'estendue du finage peut contenir environ cent journaux de terre. Il n'y a point de commerce, ny ne s'y en peut faire. Il n'y a point de rivière, pont, ny passage [pouvant donner lieu à un péage].

VI - Si c'est un pays de forêt, de plaine, que vaut l'arpent de terre, la soiture de pré : Il y a environ 400 pas de plaine, tout le reste en costeaux, rochers et broussailles. On y sème [dans cette plaine] environ la dix(ième) partie de [en] froment, et le reste orge et avoine. Il n'y a point de vigne. Il y a environ 40 soitures* de prest [pré]. Le journal de terre, le fort portant le faible, vaut environ V l (5 livres). La soiture de prest (pré) VI l (6 livres). Le bois appartient au seigneur haut justicier [*La soiture est la superficie qu'un homme pouvait faucher en une journée, un peu plus de 25 ares].

VII - Le nombre des habitants de la paroisse, des fiefs, hameaux et métairies qui en dépendent, s'ils sont estimés riches ou pauvres : Il y a environ quatre-vingtz habitans [Lire : 80 feux ? ]. Ils sont estimés pauvres.

VIII - La somme des impositions de la paroisse, si c'est par des commissions séparées, s'il ne se fait d'impositions que pour les deniers du roi : Lad. parroisse et hameaux sont imposés, la présente année, à la somme de VIc LXVIIIl I s [668 livres 1 sol]. Il ne s'y fait aucune imposition que pour deniers royaux.

IX - Les péages, octrois, charges ordinaires : Il n'y a point de péages ny octroys. Les charges ordinaires desd. lieux reviennent à IIIc XX l [320 livres] par an, et outre ce, il convient faire fermer les cimetières de Chan-fournier et de Giron, et pour ce, il faut la somme de IIIIc l [400 livres], pour une fois.

X - Les dettes de la communauté : La communauté ne doibt rien, les particuliers sont fort obérez [endettés], leurs maisons ayant ésté bruslée lors de la Guerre du Comté de Bourgongne.

XI - La qualité et quantité des biens communaux, avec mention de ceux aliénés ou usurpés : Il y a quelques communaux en chaque hameau, en rocher et bro(u)ssailles, qui leur ont esté albergez par le Sr Prieur de Nantuaz, d'environ 4000 pas de long et 300 pas de large [Soit environ 67 hectares en comptant un pas de 75 cm], en rochers et buissons, qui ne peuvent servir que pour le champoy des chèvres. Il y a quelq(ues) partie d'alliénée depuis dix ans en ça, en l'hameau de Monetier, pour la somme de IIIIc l [400 livres] ou environ, employée pour l'utilité dud. hameau.

XII - Le revenu de la cure, le nom du collateur et si le curé s'acquitte de son devoir : La cure peut valoir IIcL l [250 livres] de revenu. Le Sr Evêque de Genève en est le collateur et le Sr prieur de Nantuaz le patron. Le curé s'aquite bien de son devoir.

XIII - A qui la dîme de la paroisse appartient, sur quoi elle se lève, de combien, ce qu'elle est affermée ou estimée : Les deux tiers de la dixme appartienent au seigneur et le tiers au curé. Se lève sur le bled, la dix(ième) de froment, les deux tiers orge et le reste avoine. Se lève de 13 gerbe l'une, est affermée par commune année, 50 coupes à 4 mesures, la coupe estimée cent livres [Genolin semble avoir lu une autre version : "La dîme est estimée 100 livres ; elle est affermée, par commune année, 50 coupes, à 4 mesures la coupe. Elle se lève de 10 gerbes l'une sur le froment, et de 15 gerbes l'une sur l'orge et l'avoine" (Champfromier, ... page 74-75)].

XIV - Les bénéfices situés dans l'étendue de la paroisse, leur ordre, le nombre des religieux, leur service, l'état des bâtiments, les revenus, le nom du collateur et celui du possesseur : Il n'y a aucun bénéfice dans l'estendue de lad. parroisse.

 

Justificatifs : Archives Départementales de la Côte-d'Or à Dijon [C 2891, pages 185-188 (ou en ligne, pages numériques 93-95), ou version imprimée en usuel aux AD01]. Pour ce bailliage, il existe aussi trois autres exemplaires (non consultés), l'un à la Bibliothèque Municipale de Bourg (semblable) et un autre aux Archives Départementales de l’Ain (entièrement manuscrit mais qui semble plus récent), et le troisième à la B.N. (Ms 500 Colbert n° 264-272). On dispose aussi d'une version imprimée consultable en usuel aux AD01, qui présente quelques différences (300 au lieu de 400 livres pour réparer les cimetières au titre IX ; 15 gerbes au lieu de 13 au titre XIII)

Dernière mise à jour de cette page, le 20 novembre 2009.

 

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