Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

Le moulin communal de Champfromier (1912-1962)

 

Les grandes époques

On a du mal à imaginer maintenant Champfromier au temps des champs de céréales ! L’ancien moulin communal, situé au Pont d’Enfer, est pourtant pour témoigner d'un passé agricole qui fut même florissant. Depuis le pont, sur la route départementale qui va à Chézery, on aperçoit un bâtiment imposant sur la Volferine, mais nombreux sont les passants qui ignorent que c'est l'ancien Moulin Communal. Sur les anciennes cartes postales on voit encore la roue du moulin, vestige de son usage à l'époque où l'énergie était transmise par la télémécanique, avec de gros câbles reliant cette roue, par l'intermédiaire d'un pylône, à une turbine située en aval dans le lit de la Volferine.

Une note signale qu'en 1907, on comptait encore 3 petits moulins à Champfromier, dont un à Evuaz et un autre à Pont d'Enfer [G. Juillard]. Mais elle ne semble concerner que des bâtiments et non une activité. Le moulin de Moulin-Dernier est fiscalement démoli en 1881, et l'un au moins des deux moulins du Pont d'Enfer fut lui aussi défiscalisé en 1886.

De nos jours, plus aucune céréale n'est cultivée à Champfromier, mais en 1907 la récolte était encore d'à peu près 1600 quintaux de blé et 800 quintaux de blé-méteil [Pommerol]. Au début du XXe siècle, pour moudre le blé de Champfromier il fallait donc le porter à Chézery (13 km aller-retour). Or en février 1904, le moulin tenu par M. Verchère à Chézery prend feu, et la mère du meunier en meurt grièvement brûlée [L'Abeille, du 07/02/1904]. Dans sa famille, il est d'ailleurs bien de transmission orale que "le grand-père ne souhaitait pas que ses descendants habitent ce moulin de Chézery , une maison qui portait malheur". C'est certainement ce drame familial qui a contribué à ce qu'un moulin communal soit construit à Champfromier et que plus tard, Louis Verchère, de Chézery, devienne le meunier de Champfromier, au moins des années 1931 à 1946 (recensements).

L'étude de la courte vie de ce moulin communal, qui n'a duré qu'un demi-siècle (1912-1962), parallèlement à la ligne de tramway Bellegarde-Chézery qui, elle, avait privilégié l'énergie électrique dès le départ, s'inscrit dans un contexte plus général, celui de l'histoire de la France : la télémécanique qui ne dura qu'un court moment, bien vite relayée par l'électricité, les lois sociales de 1936 et leurs conséquences (prise en considération de l'ouvier, salaire, assurance, mais aussi augmentation des prix), enfin la Seconde guerre mondiale (hommes en nombre insuffisant) et la forte régression du nombre de cultivateurs (disparition progressive des céréales cultivées sur des petites parcelles). Au pic de la production du moulin communal de Champfromier en 1933 avaient aussi succédés une mauvaise météorologie et un remplacement de matériel bien vite usagé.

Sur le schéma ci-dessous, on peut voir en haut l’ancien moulin communal (à gauche), avec le pont du tram et ses arches. Le stand de tir (à gauche) a été détruit au profit du bâtiment technique communal actuel (mais la tranchée de tir, à droite, subsiste encore). Les restes du pilier de la télémécanique, ainsi que le "Pont des chèvres" restaurés, sont encore visibles. Le bâtiment et des éléments de l'ancienne turbine sont en ruine.


Schéma de la télémécanique [Champfromier, Les moissons de la mémoire (p. 128)]

Un moulin communal, un projet de fin de mandat en 1904, timidement repris en 1905

Dès février 1904, le moulin de Chézery ayant brûlé et les élections municipales de Champfromier étant au mois de mai..., Maxime Coutier, maire et industriel, est autorisé par son conseil "à faire procéder à une étude préliminaire pour l'établissement d'un moulin public mû par les eaux de la Volferine" [RD13, f° 132 (14/02/1904)]. Mais le maire n'étant pas réélu, le projet n'est plus au programme, et une partie de la population s'en attriste.

L'Avenir Régional, suivant les aspirations de ses modestes lecteurs, publie dès 1905 une réflexion sur l'augmentation du prix de la farine par les "chapeaux blanc", une denrée pourtant à la base de notre pain quotidien et produite avec difficultés sans grands avantages pour les cultivateurs. On devine que l'idée qu'un moulin communal ferait baisser les prix de la farine... Cependant, un mois plus tard, la même presse annonce que le Conseil municipal a décidé la construction... d'un moulin municipal, l'installation de forces motrices, et même l'éclairage électrique de la commune ! Mais l'auteur anonyme n'y croit pas, il faut d'abord racheter le barrage de Maxime Coutier, l'ancien maire.

Moulin
[L'Avenir Régional, du 10/02/1905].
Moulin communal

[L'Avenir Régional, du 10/03/1905].
Moulin communal
[L'Avenir Régional, du 17/03/1905]

Entre temps, L'Abeille du Bugey, entretenait les correspondances entre anonymes !

Moulin communal

[L'Abeille du Bugey (5 mars 1905)]
Moulin communal

[L'Abeille du Bugey (26 mars 1905)]

Puis on oublie tout... Comme l'avait exprimé un pamphlétaire, le projet n'avance pas...

Toutefois, en mai 1906, le maire est autorisé par son conseil à faire dresser les plan et devis des travaux de construction d'un moulin public à Pont d'Enfer, mû par les eaux de la Volferine [RD13, f° 156 (27/05/1906)]. Quelques mois plus tard un projet est présenté par M. Moinat, architecte à Nantua, et le conseil en approuve toutes les dispositions, d'un montant total de 34.987,21 francs, comprenant l'installation du moulin (20.189 francs) et un bâtiment (14.798,21 francs) [RD13, f° 157v (19/08/1906)].

Le moulin communal, un projet ressorti et modifié en 1907

En mars 1907, on voit poindre les élections municipales de mai 1908... Les partisans du moulin communal en profitent pour relancer le sujet, par l'intermédiaire de la presse. Du coup l'équipe municipale, qui n'avait toujours pas acquis le barrage Coutier, s'oriente vers un autre projet (location de la force électrique prévue pour le tramway), ce qui n'est pas non plus du goût de tout le monde...

 

Moulin communal

[L'Avenir Régional, du 01/03/1907]
Moulin communal
Moulin communal

[L'Avenir Régional, du 07/06/1907]

En mai, la mairie avait repris la main, exprime que cette construction répond à un besoin urgent, "attendu que les cultivateurs de la localité sont obligés d'aller faire moudre leur blé à une distance de plus de dix kilomètres" et maintient sa délibération du 19 août 1906, le montant de la réalisation s'élevant toutefois désormais à la somme de 37.436,21 francs [RD13, f° 162v (06/05/1907)]. On étudie même une autre source d'énergie et le conseil désigne une commission "chargée d'étudier le traité à passer avec M. Bergeron, concessionnaire du tramway de Bellegarde à Chézery, pour la location de la force électrique nécessaire au fonctionnement du moulin communal projeté à Pont d'Enfer" [RD13, f° 164v (26/05/1907)].

 

Achat du barrage Coutier (novembre 1907)

Rappelons qu'en 1881, Maxime Coutier, avait demandé d'amodier (de louer) ou d'acheter du terrain sur les rives de la Volferine pour y construire un barrage et une usine électrique. En 1882, une fois les formalités remplies, la construction du barrage avait été autorisée, et il avait donc été construit. En novembre 1883, l’on trouve trace du procès-verbal de récolement (réception) de ce barrage. Le projet (Coutier) était alors de poser une canalisation pour une usine électrique, au lieu-dit « La Gouille-ronde », à 190 m en aval du barrage établi sur la Volferine (lieu de la future turbine), laquelle usine aurait alimenté sa plâtrière de Montanges (Prébasson) par une ligne électrique. Et il avait été mis dans la balance que les cultivateurs de Champfromier auraient alors pu profiter de meilleures conditions pour l’achat de plâtre à usage d'engrais. Un bail de 99 ans avait été concédé en 1898, mais finalement le projet Coutier n’a jamais vu le jour et en était resté à la seule réalisation du barrage. L'initiateur ayant été battu aux élections municipales de Champfromier en 1904, l'exploitation de son barrage n'avait guère eu de répondant de la part du maire lui ayant succédé... [Informations extraites des Registres de Délibération et du carton d'archivage O21]

Coup de théâtre à la cession de novembre 1907 du conseil municipal de Champfromier. Monsieur le maire (Marius Ducret) donne connaissance qu'il vient de passer acte avec M. Coutier (l'ancien maire), concernant le barrage qu'il avait construit et que la commune se propose d'utiliser pour actionner le moulin communal projeté à Pont d'Enfer, moyennant la somme de 5.000 francs. Ses arguments sont maintenant que l'énergie électrique provenant de l'usine à construire pour le tramway est très onéreuse et nécessiterait la présence d'un électricien à plein temps pour en assurer le bon fonctionnement, et que la dépense pour assurer l'entretien des appareils électriques serait hors de proportion avec l'usage du moulin. La force hydraulique est bien suffisante et demande peu d'entretien. Le conseil approuve l'acte passé et vote les 5.000 francs [RD13, f° 166 (24/11/1907)].

Nouveau projet en 1908, et construction en 1909

En janvier 1908, le barrage étant enfin acquis par la commune, c'est un nouveau projet de construction du moulin communal actionné par la rivière la Volferine qui est présenté par le même architecte (lire Moinat, et non Moissat), pour un coût total de 58.538 francs, incluant un câble télédynamique (lire ci-dessous 14.798,20 francs), le tout relayé par la presse. Pour se faire, seront utilisés les fonds disponibles de la commune et le produit de la vente d'une coupe extraordinaire autorisée par décision ministérielle, comprenant 1351 mètres-cubes de bois d'œuvre [L'Avenir Régional, du 30/01/1908 et RD13, f° 170 (05/01/1908)].

Moulin communal

Début 1908, on croyait la construction du moulin imminente. Mais non, en octobre 1909, on en était encore à reporter l'adjudication des travaux de "construction d'un moulin à cylindres", fixée primitivement au 7, et renvoyée au 14 novembre prochain [C'est M. Berrod, entrepreneur à Champfromier, qui remportera cette adjudication, le 14 novembre 1909]. Quelques semaines plus tard la presse prolonge l'information en signalant que l'adjudication a eu lieu et que "le montant total de l'adjudication, avec les imprévus, se monterait à 23.000 francs" [L'Avenir Régional, du 21/10/1909 et 18/11/1909].

 

Les travaux commencent en 1910

Un premier acompte de 1.000 francs est versé pour les honoraires de l'architecte Moinat, le 27 juin 1909 [RD13, f° 184]. Un traité de gré à gré était intervenu le 22 mai 1910 entre M. le maire et M. Lacroix Olympe dit Alfred, ingénieur constructeur à Dole (Jura) pour la fourniture du mécanisme et matériel de meunerie, moyennant le prix global de 20.000 francs, et M. le Préfet est prié d'autoriser ce traité [RD13, f° 188 (22/05/1910)]. Un premier acompte de 3.767,40 francs est aussi versé à Achille Berrod [CI-6672 (demeurant alors à Monnetier-Crêt)], entrepreneur des travaux de construction dudit moulin [RD13, f° 188 (22/05/1910)]. Un deuxième acompte à M. Berrod de 7.122,42 francs, suivra, le 21 avril 1910 [RD13, f° 190v], puis un troisième de 2.589,40 francs le 5 décembre 1910 [RD13, f° 192v]. Un traité de gré à gré était aussi intervenu le 17 septembre 1910 (mais on lira à la réception définitive que le contrat était daté du 7 juin 1911) entre M. le maire et M. Hercule Ernest, constructeur à Maillat (Ain), pour la fourniture de la turbine, pour le prix global de 12.600 francs, et M. le préfet est sollicité pour l'autoriser [RD13, f° 190v (17/09/1910)].

En février 1911, on vote une rallonge : une somme de 4.010,65 francs est votée pour le montant du devis supplémentaire dressé par M. Moinat architecte [RD13, f° 193v (12/02/1911)]. Les frais s'accumulent donc, ceux du moulin (dont seuls 14.479,22 francs ont été payés sur un total prévu de 53.538,20 francs) s'ajoutant à ceux de la ligne de tramway (33.333 francs à la charge de la commune). La commune décide donc de contracter un emprunt de 40.000 francs auprès du Crédit Foncier de France, remboursable en 10 ans par des coupes de sapins [RD13, f° 196 (21/05/1911)]. La construction de l'ouvrage se termine, on commence à penser aux risques à venir.

Le moulin fonctionne (janvier 1912)

Janvier 1912 commence tout juste. Enfin le moulin communal de Champfromier va fonctionner ! Mais n'oublions pas que celui de Chézery à qui il doit son existence avait brûlé. Une police d'assurance est passée au nom de la commune avec La Nationale, contre les incendies, au prix de 74,20 francs pour la première année (fin de 1911), puis de 94 francs pour la période allant du 15 janvier au 15 septembre de 1912, avec la prévision d'un montant annuel de 211,65 francs pour les années suivantes [RD13, f° 198v (16/09/1911) et RD14, f° 7 (18/02/1912)].

Un questionnaire des contributions directes, passé à Gex le 16 janvier 1912, sur plusieurs personnes de Champfromier et sur le moulin communal, autorisé par arrêté du 3 août 1911, fait réponse que le moulin est installé depuis le 10 janvier 1912, et qu'il fut fait par l’entrepreneur Berrod Achille, à Champfromier, pour 19.000 francs de travaux [AC, carton M5 (lavoirs !)]. Toutefois, le procès-verbal de réception définitive des travaux de construction du moulin communal, avec remboursement du 1/10e de garantie à l'entrepreneur Berrrod, de même que pour la force motrice par M. Hercule à Maillat, ne se fera que le 31 janvier 1913 [RD14, ff° 24 et 25].

C'est le moment de fixer les tarifs de moutures et d'observer les recettes, qui seront en constante augmentation jusqu'en 1933. Le conseil fixe comme suit la taxe de mouture à imposer aux propriétaires de la commune qui font moudre du blé au moulin communal. Pour 1912 : Par 100 kg de blé et méteil : 1,75 francs ; Par 100 kg d'orge, seigle, avoine, maïs : 1 franc [RD14, f° 7 (18/02/1912)]. Par la suite ces tarifs seront invariables avant d'augmenter progressivement, puis considérablement durant la Seconde guerre mondiale. En 1913, les tarifs sont fixés à 1,75 francs et 1 franc, pour les propriétaires de la commune [RD14, f° 23 (18/01/1913) et f° 39 (15/02/1914)]. Ils ont arrondi à 2 francs et 1 francs, pour les moutures de 1917 et 1918, en ce qui concerne les habitants de la commune, et à 3,50 francs pour la mouture du blé des propriétaires étrangers à la commune  [RD14, f° 77 (31/12/1918)]. Pour 1919 et 1920 les taux sont inchangés pour les habitants de la commune (2 francs et 1 franc), mais montent à 5,50 francs pour les blés des étrangers  [RD14, f° 97 (23/05/1920)]. En 1921 et pour 1922, ils passent à 2 francs et 1 franc, et sont inchangés pour 1923 et 1924 [RD14, f° 127 (25/06/1922) et f° 146 (02/03/1924)]. Il semble que l'achat récent d'un meuleton offre de nouveaux débouchés : le prix d'une battue de trèfle est fixé à 4 francs pour les habitants, et 6 francs pour les gruaux, tandis que les prix sont de 6 et 8 francs pour les étrangers [RD14, f° 241 (06/09/1931)]. Une mesure d'augmentation avait été prise pour ceux qui n'étaient pas des habitants de Champfromier. Le conseil décide qu'à partir du 1er avril 1934, "la taxe de mouture de blé pour les étrangers sera fixée à 8,50 francs au lieu de 8 francs" [RD14, f° 307 (19/03/1934)]. Un récapitulatif est bientôt produit, toujours pour les 100 kg : Pour les personnes habitant la commune, la mouture de blé est à 6 francs, le concassage à 4 francs et le blutage de l'orge à 5  francs. Pour les personnes étrangères à la commune, les tarifs sont respectivement de 8,50 francs, 5 et 6 francs [RD14, f° 309 (12/04/1934)]. Vu l'augmentation des charges sociales et sur les matières, le conseil porte de 8,50 à 9,50 francs, le prix de la mouture du quintal pour les étrangers, à compter du 1er avril 1937 [RD14, f° 375 (07/03/1937)]. De même, ainsi que pour l'augmentation du salaire du meunier, la mouture du quintal de blé augmente encore pour les étrangers de 9,50 à 10 francs, à partir du 15 février 1938 [RD14, f° 397 (06/02/1938)]. En pleine guerre, les tarifs sont actualisés, pour les 100 kg, à 6 francs pour les habitants de la commune (inchangé) et à 13 francs pour ceux qui sont étrangers à la commune (à partir du 15 septembre 1941) [RD14, f° 455 (24/08/1941) et f° 456 (07/09/1941)]. La hausse se poursuit, cette fois pour tous, à 18 francs pour les blés des étrangers, 10 francs pour ceux de la commune, et 7 francs pour le concassage des céréales, à compter du 20 septembre 1942 [RD14, f° 472 (20/09/1942)]. Un forte hausse, justifiée par un arrêté du préfet fixant les taxes à verser au Groupement de Répartition des farines par les meuniers d'Echange, fixe les taux à 14 francs pour la mouture des blés par les habitants de la commune, et à 24 francs pour les étrangers [RD14, f° 481 (02/05/1943)]. A la fin de la guerre les tarifs atteignent des sommets : 25 francs pour les 100 kg de blé, de même 60 francs pour les gruaux, 16 francs pour le concassage et 10 francs pour le trieur. Pour les étrangers de la communes, les tarifs les tarifs deviennent les mêmes, sauf 35 francs pour les blés [RD15, f° 14 (01/07/1945)].

Il n 'était pas rare qu'à Champfromier des personnes soient assistées par la commune, ne pouvant payer certains honoraires comme ceux des soins médicaux, ou autres. Affouage ou mouture, faisaient aussi parties de ces indispensables à la vie, et sans en offrir la gratuité, la commune pouvait au moins retarder l'échéance du paiement. En 1913, le conseil admet en "non valeur" les 3,35 francs de mouture par la veuve Auguste Nicollet, restant à recouvrer [RD14, f° 39 (10/12/1913)].

En contrepartie de l'encaissement des taxes, il faut aussi payer le meunier : le conseil vote à M. Masset Félix, ouvrier meunier, la somme de 480 francs, pour paiement de 80 journées de mouture au moulin communal, calculée à raison de 6 francs l'une. La somme sera imputée sur le produit des taxes de mouture dont le rôle dressé le 14 avril 1912 se monte au total de 704,35 francs [RD14, f° 10 (14/04/1912)]. Et en avril 1913 ce sont 462 francs qui sont votés pour 77 journées qui sont dues au même meunier Masset [RD14, f° 26 (20/04/1913)]. On lui ajoutera 31 journées et demie, en juin et juillet 1913, soit 149 francs [RD14, f° 33 (10/08/1913)]. Le rôle de mouture de l'année 1920 se monte à la somme de 1.754,01 francs [RD14, f° 110 (27/02/1921)]. Le salaire devient ensuite annuel. En 1938, le conseil signale que, vu l'augmentation du coût de la vie et la demande du meunier, il est proposé une augmentation mensuelle de 100 francs, soit une augmentation de 10.800 à 12.000 francs annuellement, à compter du 1er janvier 1938, ce qui est voté [RD14, f° 397 (06/02/1938)]. En respect de la loi du 23 mai 1941 (concernant aussi les autres employés communaux), une allocation supplémentaire mensuelle de 86 francs est allouée au meunier, avec rappel du 1er juin 1941 [RD14, f° 453 (24/08/1941)]. La guerre presque terminée, le conseil du nouveau maire (O. Tournier) décide de porter le traitement annuel du meunier à 16.000 francs, à dater du 1er octobre 1944, soit une augmentation mensuelle de 247 francs sur les trois derniers mois [RD15, f° 4 (31/12/1944)]. Une nouvelle augmentation intervient peu après pour le meunier, son salaire n'étant pas à son taux, relativement à l'augmentation du coût de la vie, et le conseil décide de le porter à 25.000 francs, avec effet rétroactif au 1er février 1945 [RD15, f° 15 (01/07/1945)].

Quelques frais annexes surviendront encore, comme les 244,60 francs payés à MM. Charlas et Brocas à Lyon, pour fournitures diverses [RD14, f° 18 (15/06/1912)], déplacée deux fois de ligne du budget [RD14, f° 25 (23/02/1913) et f° 27 (20/04/1913)]. Une somme de 391,05 francs est payée à M. Hercule pour travaux à la turbine [RD14, f° 34 (10/08/1913)]. La plus grosse facture, 6.199,93 francs, est à nouveau pour exécution de travaux supplémentaires par la même entreprise Berrod et aussi proposés par Moinet architecte [RD14, f° 32 (25/05/1913)]. Un acompte de 3.000 francs en est payé en août 1913 [RD14, f° 34 (24/08/1913)]. La réception de ces travaux supplémentaires se fait en décembre 1913, avec payement du solde de 2794,35 francs à M. Achille Berrod et 405,58 francs à l'architecte [RD14, f° 37 (10/12/1913)]. Une somme de 486,75 francs est payée pour intérêts dus à MM. Lacroix Frères de Dôle, pour retard de payement sur la somme de 8.000 francs restante [RD14, f° 38 (10/12/1913)].

Quelques années plus tard apparaîtrons des factures de réparations et fournitures diverses, à Charlas et Brocas de Lyon, et à Hercule de Maillat, pour un total de 343,60 francs [RD14, f° 65 (16/12/1917)]. Les Frère Lacroix de Dôle reçoivent 437 francs pour [RD14, f° 68 (10/03/1918)]. Monsieur Hercule, de Maillat, reçoit 914 francs pour réparations [RD14, f° 74 (25/08/1918)]. Le conseil vote la somme de 415,55 francs pour fournitures à Charlas et Brocas de Lyon [RD14, f° 118 (11/12/1921)], la somme de 1.377,55 francs pour réparations aux Frères Lacroix [RD14, f° 119 (19/02/1922)]. En 1926, autorisation est demandée à M. le Préfet, de traiter de gré à gré avec la Maison Lacroix de Dôle, pour réparations suivant un devis de réparations se montant à 12.462 francs [RD14, f° 170 (21/03/1926)], puis à 14.648,20 francs [RD14, f° 174 (11/07/1926)], ce qui est accepté puisque l'on paye ensuite 442,68 francs d'honoraires à Moinat architecte, pour ces réparations [RD14, f° 178 (30/01/1927)]. L'architecte reçoit encore en novembre la somme de 216,48 francs d'honoraires pour travaux [RD14, f° 187 (20/11/1927)].

Fin 1929, Jules Nicollet étant devenu maire depuis le mois de mai, un projet de construction d'une annexe au moulin communal est souhaité, en même temps que d'autres travaux de bâtiments communaux, pour un montant total de 148.500 francs [RD14, f° 212 (18/08/1929)]. Le conseil demande ensuite à M. le Préfet, de l'autoriser à traiter de gré à gré avec la Maison Lacroix de Dôle, pour l'installation d'un meuleton au moulin communal, suivant devis de 5.650 francs, et vote la somme [RD14, f° 216 (14/12/1929)]. Ce n'est pas encore suffisant, en 1932 le conseil décide de ré-agrandir l'entrepôt du moulin ! [RD14, f° 263 (03/07/1932)].

En 1933, le conseil décide de faire établir un devis pour réparation ou remplacement de la turbine [RD14, f° 281 (26/02/1933)]. Le conseil accepte le remplacement de la turbine, suivant le projet établi par les Etablissements Magnat-Simon à Pont de Claix (Isère), et accepte de fournir le manœuvre pour aider au montage, toutefois à la charge de la maison, et les travaux devant être terminés fin juillet [RD14, f° 285 (17/05/1933)]. En 1934 intervient une loi qui taxe les moutures à 1 franc du quintal, jusqu'à 50.000 quintaux, soit 410 francs pour le moulin communal de Champfromier, jusqu'au 30 septembre [RD14, f° 324 (07/10/1934)]. En 1936, suite à des intempéries, des réparations de toitures furent effectuées malgré l'absence temporaire de budget, pour un montant de 1.240 francs, rien que pour la toiture (et la salle) du moulin [RD14, f° 369 (27/10/1936)]. Une (double) délibération mentionne que "vu l'état de vétusté et l'urgence de la réparation des volants assurant traction du moulin communal", le conseil décide de remplacer la traction par câbles par la traction (une commande) électrique, adaptée et produite par la turbine existante, et demande l'autorisation de traiter de gré à gré avec la Maison Magnat-Simon qui a installé ladite turbine, suivant le devis de 37.850 francs, et rajoute (dans le second acte) une demande d'exonération de taxe, vu l'utilité publique) [RD14, ff° 385-386 (20 et 28 juillet 1937)]. Les travaux de remplacement du câble par une commande électrique ayant été payés, il reste une hausse de 8,70 % pour taxe à la production, soit 3.292,95 francs à payer [RD14, f° 399 (10/04/1938)].

Puis c'est la guerre. Le conseil se voit contraint de voter une somme de 1.000 francs en prévision de l'arrêté du Préfet du 21 avril 1943, pour taxe à verser au groupement des meuniers d'Echange [RD14, f° 484 (23/07/1943)], puis bientôt encore de 2.200 francs [RD14, f° 493 (19/02/1944)]. En 1952, le conseil demande le marquage de bois pour les réparations de nombreuses toitures, dont celle du moulin [RD16, f° 40v (17/01/1952)].

L'assurance incendie du moulin est un soucis permanent, celui du meunier ne viendra que plus tard. Après la police passée avec la Nationale dès janvier 1912, on retrouve la dépense prévisionnelle de 211,20 francs d'assurance incendie pour 1912 [RD14, f° 20 (20/10/1912)], puis le déplacement du montant de cette assurance à une autre ligne du budget par suite d'insuffisance de fonds libres... [RD14, f° 21 (01/12/1912)]. Des avenants sont votés, 22,65 francs sur l'année écoulée, et 188,90 au prochain 15 septembre [RD14, f° 126 (18/06/1922) et f° 127 (27/08/1922)]. En 1927, la commune vote un supplément de 521,40 francs d'assurance incendie et, pour la première fois, une prime d'assurance de 338,75 francs contre les accidents pour l'ouvrier meunier [RD14, f° 183 (12/06/1927)]. On paye encore 190,10 francs de prime d'assurance incendie, pour la période allant du 25 avril au 15 septembre 1927 [RD14, f° 187 (02/10/1927)]. La prime d'assurance pour le meunier est de 333,75 francs pour assurance à partir du 15 avril 1928 [RD14, f° 196 (17/06/1928)], mais une augmentation de 86,10 francs est votée à la fin de l'année [RD14, f° 201 (02/12/1928)]. L'assurance incendie, elle, pour l'année commençant le 15 septembre 1928 se monte à 879,05 francs [RD14, f° 199 (30/09/1928)]. Le conseil autorise M. Picquet, agent d'assurances à Bellegarde (de la Nationale), à rétablir la police d'assurance contre l'incendie du moulin, qui expire le 15 septembre 1929 [RD14, f° 212 (18/08/1929)]. En 1932, est établi un avenant contre l'incendie, tant de l'annexe que sur les marchandises se montant à 40.000 francs [RD14, f° 272 (16/10/1932)]. Puis le conseil décide de faire faire un avenant de réduction, pour modification de tarif pour la police [RD14, f° 292 (23/09/1933)]. Après-guerre, les polices d'assurances des bâtiments communaux (n° 10973) et du moulin (n° 10974) auprès de la Compagnie La Nationale sont révisées, en accord avec M. Picquet, agent général de ladite compagnie, soit 15.888 francs pour le moulin (et 4.008 francs pour le bâtiments communaux) [RD15, f° 22 (16/12/1945)]. Dans le cadre d'une révision générale, le capital du moulin est augmenté de 1.100.000 francs, à la charge de l'assurance de la coopérative (ayant le même assureur La Nationale) pour certains articles [RD16, f° 50 (29/06/1952)], puis encore de 450.000 francs par arrangement proposé par l'assureur en annulation d'un rabais [RD16, f° 59v (22/02/1953)], et enfin encore de 550.000 francs et atteindre 5.000.000 francs avec une prime annuelle se montant à 28.305 francs [RD16, f° 90 (15/03/1955)], et enfin augmente encore le capital à 100.000 NF, plus 10.000 NF pour toutes explosions, avec une prime totale de 582,87 NF [RD17, f° 78 (21/07/1960)].

Une commission Moulin Communal s'instaure en 1930. Le conseil désigne trois de ses membres (Louis et non Marius Collet, Félix Coudurieret Antonin Ducret) pour faire partie de la Commission du Moulin communal [RD14, f° 224 (15/06/1930)]. Les mêmes trois membres (Louis Collet, etc.) sont désignés en 1931 [RD14, f° 238 (07/06/1931)]. En janvier 1932, la commission approuve les comptes (sans en préciser le montant...) [RD14, f° 249 (31/01/1932)]. Le conseil désigne M. Duraffourd Laurent pour assurer la comptabilité du moulin communal, en remplacement de M. Tournier Camille décédé, avec l'indemnité prévue [RD14, f° 488 (25/10/1943)].

Si les comptes ne sont connus qu'irrégulièrement, on sait toutefois que les recettes progressent allègrement jusqu'en 1933, mais que les comptes passent au rouge en 1938. Sans précision, on sait que le conseil a approuvé le règlement intérieur du moulin et les tarifs début janvier 1928 [RD14, f° 189 (22/01/1928)]. Les comptes sont approuvés, pour l'année 1930, les recettes se montant à 20.221,75 francs [RD14, f° 231 (08/02/1931)]. Les comptes de l'année 1932 sont approuvés, et 8.800 francs (d'excédent de recettes) versés au Receveur municipal [RD14, f° 281 (26/02/1933)]. Le conseil approuve les comptes, dont les recettes sont de 34.650,90 francs, et les dépenses de 24.750,90 francs, soit un excédent de recettes de 9.900 francs [RD14, f° 307 (19/03/1934)]. L'année 1934 se présente comme celle du maximum d'activité du moulin communal (toutefois ce sont les recettes de 1933 qui furent les plus élevées) : "par suite de la grande quantité de blé reçue pendant la période de septembre à décembre, le meunier ne pouvant effectuer le travail seul", un aide lui sera affecté, et une somme de 2.500 francs prélevée au budget additionnel [RD14, f° 326 (02/12/1934)]. Les comptes de l'exercice 1934 s'élève à une recette de 29.721,15 francs, pour 7.396,35 francs de dépenses, non compris le traitement du meunier [RD14, f° 330 (24/02/1935)]. Les comptes de 1935 font état de 25.020,90 francs de recettes pour 19.215,20 francs de dépenses soit, compte tenu du déficit de 637,85 francs en 1934, un solde créditeur de 5.167,85 francs [RD14, f° 358 (11/02/1936)]. Les comptes de 1936 se clôturent avec un excédent de seulement 708,15 francs [RD14, f° 375 (07/03/1937)]. Pour la première fois les comptes passent au rouge pour l'année 1938, avec un excédent de dépenses de 1.505,40 francs [RD14, f° 411 (12/03/1939)]. En mars 1941, le conseil vote un supplément pour dépassement de crédits de 2.182,60 francs à l'exercice 1940, pour l'entretien du moulin communal [RD14, f° 443 (05/03/1941)]. Les comptes de 1942 montrent des pertes qui s'accumulent : les recettes ne sont plus que de 11.471,80 francs pour des dépenses de 17.614,20 francs, soit un déficit de 6.142,40 francs, auquel s'ajoutent ceux de 3.808,20 francs et de 8.669,90 francs des années 1940 et 1941, soit un total des déficits de 18.620,50 francs, ce qui est attribué "aux circonstances actuelles" [RD14, f° 487 (05/09/1943)]. Pour 1943, M. le Maire (M. Chapuis), président de la commission, communique le bilan, soit 15.246,20 francs de recettes et 19.845,10 francs de dépenses, soit un déficit de 4.598,90 francs qui s'ajoute a ceux de l'année précédente, et attribué aux même causes (23.219,40 de total de déficit) [RD14, f° 495 (19/03/1944)].

Le règlement intérieur

Quelques extraits  [AC de Champfromier, carton O21] : Il semble dater de l'ouverture du moulin

Fonctionnement

Les cultivateurs de la commune qui font moudre leur blé et autres céréales (méteil, orge, seigle, avoine, maïs) doivent payer une taxe de mouture :

 

Ceux des autres communes seront bientôt taxés beaucoup plus !

On a retrouvé dans les archives communales un petit carnet de mouture de 1912-1913 avec les noms, les villages, les quantités, le type de céréales et le prix.


Registre de délibération n°14 en date du 18/02/1912

Le règlement intérieur

« Le moulin municipal de Champfromier est placé sous la haute Direction du Maire et du Conseil Municipal de la Commune. Son fonctionnement est assuré par un meunier choisi par le Conseil. ».

« Le moulin est ouvert au public tous les jours, sauf les dimanche et jours fériés de 7 h à 12 h et de 14 h à 18 h du 1er mars au 30 septembre, et de 8 h à 12 h et de 14 h à 17 h, du 1 er octobre au 30 avril. »

Taxe de mouture

Un petit carnet de mouture de 1912 est conservé aux archives communales [AC 022]


On y retrouve les noms de cultivateurs de Montanges, Giron, Forens, Chézery, Belleydoux et même de St Germain de Joux… qui viennent faire moudre non seulement du blé, mais aussi de l’orge et du seigle.

Les meuniers, et les derniers aménagements

Les meuniers qui succèderont à Félix Masset sont Marius Prost de Chézery, par bail du 10 mai 1920 [RD14, f° 94 (23/05/1920)], recensé en 1921 et 1926, Louis Verchère (arrivé de Chézery en 1927, avec sa balance personnelle, meunier de Champfromier jusqu'à sa mort en 1946), une coopérative de meunerie et huilerie de début 1947 à 1858, avec Louis Tavernier [CI-7467], recensé comme meunier en 1954, et enfin Gustave Avallet, venant de Lorette (Loire), d'abord comme preneur du bail de la coopérative puis à son compte de 1960 à 1962, année où il est recensé minotier à Champfromier.

Louis Verchère décède en novembre 1946. En mars 1947, le maire (F. Coudurier) fait savoir que le moulin communal ne peut plus être géré par la commune. Il propose un bail de location avec la Coopérative Agricole de Meunerie de Champfromier qui en assurerait la marche par ses propres moyens, pour un prix de location annuelle de 15.000 francs, à dater du 1er janvier 1947 [RD15, f° 47 (08/03/1947)]. En septembre 1947, Louis Tavernier, meunier, fait partie d'une commission de collecte de céréales constituée de sept  personnes, dont le maire [RD15, f° 56 (27/09/1947)], et en novembre le conseil décide "d'élever l'annexe du moulin côté nord jusqu'au niveau du bâtiment principal, afin que soit installé au sous-sol l'appareil pour gruau, actuellement à l'emplacement réservé à la presse à huile, le premier et le deuxième étage devant servir d'entrepôts de marchandises" [RD15, f° 61 (15/11/1947)]. M. le maire reprend le sujet et dépose un projet d'agrandissement du bâtiment loué à usage de moulin à la Coopérative agricole; de Meunerie de Champfromier, pour un total de 482.996 francs, dressé par M. Prat, projeteur en bâtiments de Bellegarde, avec aménagement du sous-sol en huilerie, avec travaux urgents de gré à gré avec MM. Tournier Frères entrepreneurs à Champfromier, pour la 1ère étape, la seconde étape, en importants travaux d'élévation du rez-de-chaussée et deux étages pour entrepôts étant à mettre en adjudication, ce qui est accepté par le conseil [RD15, f° 80 (22/08/1948)]. Fin 1950, le maire expose que la coopérative "ne peut plus travailler dans de bonnes conditions, vu l'importance des demandes de transformations des céréales secondaires et souhaite l'achat par la commune d'un broyeur à marteaux à grand rendement" (pour casser des noix ?), et le choix se porte sur celui de MM. Brun frères, constructeurs à Vonnas (Ain), pour le prix de 189.377 francs. En contrepartie le bail passé devant Me Cordier notaire à Bellegarde en date du 29 mars 1947, est augmenté à compter du 1er janvier 1951 de 15.000 à 35.000 francs par an [RD16, ff° 21 et 21v (09/12/1950)]. Les factures Tournier Frères sont approuvées, pour la réfection totale de l'installation électrique, pour un montant de 89.412 francs [RD16, f° 22v (14/01/1951)]. Compte tenu des achats récents d'un mélangeur automatique pour aliments du bétail et d'un broyeur à marteaux à grand rendement, M. le sous-préfet trouve le bail sous-payé, aussi le loyer passe à 50.000 francs par an, à compter du 1er janvier 1951, et avec un bail de 9 ans, résiliable tous les 3 ans [RD16, f° 27v (20/05/1951)].

En 1958, le moulin communal est encore loué à la Coopérative de Meunerie et d'Huilerie de Champfromier et sa dissolution par manque de travaux est envisagée. Pour ces raison, l'augmentation de l'assurance sur un capital montant de 5 à 7.000.000 francs est refusée [RD16, f° 127 (22/03/1958)]. De fait, le maire reçoit quelques mois après une lettre de Me Jaccoud Robert, propriétaire à Léaz (Ain), liquidateur de la Société Coopérative de Meunerie de Champfromier, qui, au nom de ses collègues, MM. Ducret Julien et Blanc Raymond de Champfromier, et Mermillon Edouard de Chézery, propose à la commune qu'elle prenne la place de la coopérative pour continuer la gestion en absorbant son passif et son actif (matériel et machine), proposition qui est refusée mais avec proposition de pourparlers [RD16, f° 139v (26/09/1958)]. Par la suite, on apprend que le bail avec la Société de Meunerie et d'Huilerie Coopérative a été cédé à Mr Avallet, meunier à Champfromier, le 28 octobre 1958, et que le bail arrive à expiration le 1er janvier 1960, et qu'il y aurait intérêt de faire l'inventaire du moulin et de rendre compte de l'état du matériel et des machines. Une commission est désignée (6 personnes), chargée de surveiller périodiquement l'entretien du matériel, des machines et des locaux [RD17, f° 59 (31/12/1959)]. Quelques jours plus tard le conseil décide de porter le loyer annuel de 50.000 à 150.000 francs, pour l'année 1960, mais qu'elle prendra en charge la réparation de la turbine qui est défectueuse, ainsi que celle du couloir à grains [RD17, f° 60 (04/01/1960)]. Suite à la dissolution de la Société Coopérative de Meunerie, prononcée le 24 août 1958, une commission a relevé un passif de 50.000 francs en loyers à la commune pour l'années 1959, suite aux difficultés, il est décidé de ne pas recouvrer ce passif [RD17, f° 68 (07/03/1960)]. Le conseil accorde un nouveau bail, aux mêmes conditions que précédemment, au prix de 1.500 NF, à M. Gustave Avallet [RD17, f° 74 (19/05/1960)]. Le bail de location du moulin communal, passé avec M. Avallet Gustave, meunier, sera résilié à compter du 1er janvier 1963 pour manquements graves aux clauses dudit bail [RD17, f° 139 (17/05/1962)]. Un malheur n'arrive jamais seul. Les gens d'ici se souviennent encore que M. Avallet avait été victime d'un grave accident, à l'heure de la sortie des écoles. Il avait perdu un bras, arraché par une courroie.

En juillet 1963, Le conseil rappelle le départ du meunier le 1er janvier 1963, mais décide de prendre en charge la redevance d'abonnement téléphonique au poste ainsi désigné "Champfromier, Coopérative de meunerie, N° 1" jusqu'à la venue d'un nouveau locataire, mais on sait qu'il n'y en aura plus [RD17, f° 176 (19/07/1963)]. Le téléphone est transféré au domicile du maire (cession de 310,50 francs) qui s'engage à rembourser la somme avancée à la fin de son mandat [RD17, f° 221 (22/04/1965)].

La fin du moulin et sa reconversion (1963)

Le moulin communal est fermé depuis le 1er janvier 1963 et le nombre toujours décroissant des exploitants agricoles et du cheptel bovin dans la commune ne permettront plus d'apporter un travail suffisant et régulier à un meunier. Le maire demande, avant d'envisager l'utilisation du bâtiment à une autre destination de libérer les locaux du matériel qu'ils contiennent, usé, datant de la construction, en le vendant amiablement à d'éventuels acheteurs [RD17, f° 172 (10/06/1963)]. "Le moulin communal ayant cessé son activité depuis le 1er janvier 1963 est destiné à reprendre une autre affectation". Le conseil décide de céder le contingent de mouture qui lui est attribué à la CPIM (Caisse Professionnelle de l'Industrie Meunière) aux prix des barèmes de la Chambre des meuniers [RD17, f° 180 (07/10/1963)]. Deux acheteurs se sont proposés, M. Brusaferro de Bellegarde au prix de 0,05 francs le kg de ferrailles, et M. J. Coupat, récupérateur de La Cluse, au prix de 0,12 franc le kg. Ce dernier a été chargé de l'opération qui a produit 8.900 kg de vieux métaux, soit 1.068 francs [RD17, f° 185 (25/01/1964)]. Signalons par parenthèse que le matériel usagé d'huilerie (presse à huile, pompe et aplatisseur) ne sera vendu que près de 20 ans tard, à M. Bolliet Jean-Marie de Cerdon [RD19, f° 214 (25/11/1983)]. Le conseil réduit la police d'assurance aux risques du bâtiment seul [RD17, f° 190 (14/03/1964)]. Le téléphone étant sans utilisation depuis 1961, il est demandé son transfert à son domicile du maire [RD17, f° 219 (03/04/1965)]. Le contingent de la mouture du moulin, qui est de 2571 quintaux est vendu pour le prix de 2.571 francs à la CPIM, somme qui servira à l'aménagement de la cour d'honneur de la mairie [RD17, f° 232 (04/09/1965)].

Le moulin se reconverti. Le maire expose qu'il a reçu une demande des Etablissements Dujeancourt frères et Polosse, fabricants de fleurs artificielles à Oyonnax, pour la location d'une partie de l'ancien moulin communal (rez-de-chaussée, comprenant 3 pièces), pour y entreposer leurs articles, et un bail est accordé à compter du 1er mars 1966, au loyer mensuel de 50 F [RD17, f° 247 (26/02/1966)].

En juillet 1971, le moulin devient un appartement locatif. Il est loué par la commune à René Ducret [CI-7561] , ouvrier de scierie à Champfromier, pour un loyer annuel de 1.500 F, suivant un bail à effet en date du 1er août 1971. Le logement comprend, au rez-de-chaussée, une cuisine et une salle à manger, au premier étage, deux chambres à coucher, à l'extérieur un WC, une cour commune et un bûcher [RD18, f° 138 (24/07/1971)]. En 1972, M. le Maire accepte la convention passée avec M. Gervasoni, architecte à Bellegarde (Ain), chargé pour le compte de la commune de dresser des projets de travaux, dont l'aménagement de logements dans l'ancien moulin communal (et des sanitaires dans les anciens lavoirs) [RD18, f° 167 et 167a (26/10/1972)]. Aussi deux ans après l'arrivée du locataire Ducret, une pièce supplémentaire lui est accordée, avec un loyer passant à 1.860 F [RD18, f° 188 (12/07/1973)].

En 1978, une lettre est adressée à l'OPAC, pour demander des précisions au sujet de la dotation à la commune pour 2e semestre 1978 et sur le projet d'amélioration du moulin et notamment l'aide qui pourrait être demandée à la commune [RD19, f° 23 (09/06/1978)]. Des travaux aux bâtiments communaux sont prévus, dont 2.190 F pour le moulin (devis Gavaggio) [RD19, f° 46 (02/02/1979)]. En vue de l'installation d'un artisan ébéniste (Bouteraon), des plans et devis sont demandés à M. Jean Fervel, métreur à Châtillon, pour la création du sanitaire du logement et d'un escalier d'accès à l'étage [RD19, f° 149 (18/12/1981)]. Suite au décès de René Ducret, son logement est loué à Mme veuve Ducret Joseph née Gach, sa mère, pour un loyer annuel de 2.461,70 F, avec effet au 1er avril 1983, avec un nouveau bail voulu par la sous-préfecture [RD19, f° 197 (29/04/1983) et f° 203 (21/07/1983) ]. Dans le même temps, il est prévu à la même date un bail à intervenir du bâtiment, sauf la location Ducret-Gach, pour M. Michel Bouteraon occupe déjà les lieux gratuitement, dans le cadre de l'aide à l'implantation d'artisanat en milieu rural [RD19, f° 197 (29/04/1983)]. En 1985, le conseil prend connaissance d'une réunion avec la SCIC et envisage dans un premier temps la rénovation du moulin communal, après étude financière [RD19, f° 258 (26/04/1985)]. M. le maire, qui souhaite réaliser des logements locatifs, accède à la demande de M. Jacky Ducret de Montanges, de bénéficier d'un logement actuellement vacant, pour un loyer mensuel de 500 F, à condition de le libérer au plus tard le 31 mars 1986, mais, un accord lui sera donné pour rester jusqu'au 30 juin, avant de déménager [RD19, f° 266 (26/07/1985) et RD20, f° 15 (13/03/1986)].

Fin 1985, le conseil examine le projet d'aménagement de l'ancien Moulin en logements locatifs, sachant que l'étude financière doit être présentée début novembre [RD19, f° 273 (24/10/1985)]. Mais, suite à la demande d'un artisan plombier intéressé (Eric Loschi), le conseil envisage la vente de l'ancien moulin sous forme de crédit-bail [RD20, f° 24 (06/06/1986)]. Le maire ayant rappelé sa volonté de vendre l'ancien moulin, le conseil décide de le céder à M. Eric Loschi, artisan plombier, afin de favoriser le développement des activités artisanales dans la commune (Parcelle AB 251, bâtiment dit "Le Moulin", et terrain attenant de 670 m2), pour un montant de 200.000 francs [RD20, f° 38 (12/12/1986)]. On croyait le moulin vendu, mais non, car l'acheteur ayant des problèmes financiers, l'acte n'a pas été signé. Pourtant l'artisan en occupe déjà l'appartement. Le conseil envisage donc de lui louer au prix mensuel de 1.000 francs. Mais l'acte est barré, annulé, non remplacé [RD20, f° 67 (18/09/1987)]. Il se manifeste toutefois trois mois plus tard par un courrier où il déclare renoncer à l'achat mais accepter la location [RD20, f° 76 (10/12/1987)]. Mais quelques jour plus tard le conseil donne son accord pour la location du logement à M. Pascal Legrand, de Châtillon-en-Michaille, moyennant un loyer mensuel de 800 F [RD20, f° 79 (15/01/1988)].

Un an plus tard, le conseil étudie la proposition d'achat par un particulier, en vue de la transformer en appartements locatifs, et charge le maire de renégocier le montant de l'offre [RD20, f° 132 (23/03/1989)]. Un mois plus tard, le moulin est enfin réellement vendu. Le conseil, considérant l'intérêt pour la commune de voir se réaliser des logements, décide de vendre à Bernard Gavaggio, domicilié à Bellegarde, ou à toute société dont il serait membre, le moulin et la parcelle attenante (voir ci-dessus), moyennant le prix de 165.000 F et donne pouvoir au maire de signer [RD20, f° 135 (13/04/1989)].

L'ancien moulin communal est désormais un bâtiment locatif privé.

Que reste-t-il aujourd’hui des anciens aménagements du moulin ?

Ci-dessous, l’ancien barrage Coutier et la passerelle, l'ensemble visible depuis le pont du tram.

 
Le barrage et sa passerelle (dans son état avant qu'un arbre soit tombé dessus) ; à droite la cheminée de dépression de la conduite (Clichés Ghislain Lancel, 18 avril 2008)

  
Le pilier (7 octobre 2005), les derniers vestiges du bâtiment de la turbine et la conduite forcée (26 novembre 2011)
Clichés Ghislain Lancel.

Voir deux élégantes photographiées au pilier !

 

Compléments

Règlement intérieur [Archives communales, Dossier O21]

Quelques extraits :

Préliminaire : acquisition du barrage Coutier

Construction du Moulin – quelques dates :

Plans [0 21 – chemise Construction]

On trouve quelques plans dans le dossier O 21 des Archives Communales – chemise « construction… » :

Plans du barrage

On trouve 2 schémas du barrage dans le dossier des AC O 21 – chemise « Travaux au barrage de retenue » :

Travaux d’agrandissement, abandon de la traction par câbles, achat de matériel


18/08/1929 [RD14 f°212] 
: Un projet de construction d’une annexe au moulin voit le jour en 1929.
03/07/1932 [RD14 263] : décision de ré-agrandir l'entrepôt du moulin.
20/07/1937 [RD14 f°385] : vu la vétusté et l'urgence de la réparation des volants de traction, le Conseil Municipal décide de remplacer la traction par câbles par la traction électrique : traité de gré à gré avec la Maison Marguat-Simon.
08/03/1947 [RD15 f°47] : Le maire propose un bail de location à la Coopérative Agricole de Meunerie de Champfromier qui en assurerait la marche ; décide d'élever l'annexe du moulin côté nord au niveau du bâtiment principal pour installer en sous-sol l'appareil à gruau actuellement à la place réservée au moulin à huile; le 1er & 2e étage devant servir d'entrepôt.
22/08/1948 [RD15f°80: Travaux d'agrandissement : bâtiment communal loué à la coopérative agricole; aménagement sous-sol en huilerie ; traité de gré à gré avec Tournier Frères de Champfromier pour la 1ère étape.
09/12/1950 [RD16 f°21: Achat broyeur à marteaux à grand rendement pour les céréales secondaires. 

Quelques meuniers

Au fil des Registres de Délibérations, seuls quelques meuniers sont explicitement nommés :

François Félix Verchère fut meunier de Champfromier. Natif de Chézery, sa famille fut meunier de l’abbaye durant des siècles et lui fut le dernier. Les ruines du moulin peuvent encore se deviner au bout à gauche d’un chemin qui part à droite du Relais des Moines. Il y avait une roue à aube et les meules à l’intérieur. Convié à sécuriser la roue, son père avait préféré vendre. Etant à son compte, il arriva avec sa balance à Champfromier où il est décédé en 1946.

Exploitation du moulin – quelques dates :

Le début de la fin du Moulin communal…

 

L’ancien Moulin communal devient immeuble locatif…

 

Guerre de 1914 – déboires

On n’imagine guère les difficultés rencontrées lors de la guerre de 14-18…
Une lettre de « Lacroix Frères » (ingénieurs – constructeurs) du 10 août 1914 nous révèle un exemple des problèmes rencontrés :

Les anciens racontent…

Les anciens du village se souviennent encore des chars à bœufs qui apportaient le blé au moulin.

Stéphane Vitali raconte une anecdote inoubliable : « Il y a une histoire dont je me souviendrai toujours ! Dans les années 50, je réparais une cheminée sur le toit de la salle des fêtes. J’avais vu arriver au moulin un char à bœuf de Chézery dont les conducteurs venaient déposer des sacs de blé. En attendant, ils sont allés au café du coin boire un ou deux canons. Les bœufs se sont lassés d’attendre, et les voilà partis sur la route du retour… Apercevant de la bonne herbe dans le pré (vers la maison de la doctoresse), ils se mettent à brouter, et avancent sur le talus, et avancent… jusqu’au moment où ils font verser le char… Ah, je m’en souviendrai toujours ! »

Enfant, Hélène aimait jouer avec d'autres gamins entre les sacs de farines.

Simone se souvient tout particulièrement, à l’automne, des nombreux chars tirés par des bœufs qui amenaient des villages environnants les céréales à moudre ou à concasser. La farine « meurt » au bout d’un certain temps, c’est pourquoi les cultivateurs venaient en plusieurs fois faire moudre leur blé.

Pendant la Seconde guerre mondiale, une TSF avait été cachée tout en haut du moulin (et aussi pour une meilleure réception). Il y avait toujours quelqu'un pour y monter et écouter Radio-Londres…

Jean Coudurier. J’étais jeune et je n’ai guère de souvenirs si ce n’est qu’on apportait le blé en tracteur. Pour nous c’était une aubaine de remonter ensuite à l’école en tracteur. Ceux qui n’avaient pas de tracteur utilisaient encore des chars à bœufs. A la ferme on concassait les céréales pour les animaux, et on ne portait le blé au moulin que pour la farine. Mais bientôt les gens ont cessé de faire le pain eux-mêmes ! Lors de la fermeture, on a racheté un concasseur, mais ce ne fut pas une bonne affaire car la mouture en était trop fine.

 

Publication Marie-Claude Bordat et Ghislain Lancel, inédit       

 

 

Première publication, le 24 mai 2017 (texte en attente depuis le 11 décembre 2013 !). Dernière mise à jour de cette page, le 30 mai 2017.

 

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