Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

L'église, avant l'enlèvement des boiseries

 

Quiconque entre aujourd'hui dans l'église de Champfromier est frappé par sa nudité, un chœur sans aucune boiserie...

Il n'y a pourtant pas si longtemps que ce chœur comportait encore une chaire, une table de communion et des stalles en bois.


Cette photographie est présumée avoir été prise par Gabriel Moine, chézerand ayant longtemps fait office de photographe professionnel dans son village et à proximité (jusque vers 1950, mais cette photo semble de 1924). Mais curieusement le tirage qu'il conservait personnellement n'était pas le meilleur, on retrouve aujourd'hui d'autres exemplaires de cette photographie avec un meilleur piqué, comme celui ci-dessus (de format 12 x 17 cm), collé avec soin sur un cadre en carton.

C'est en 1965 qu'une lourde restauration de l'église est envisagée (en particulier du clocher). On en trouve la trace dans les registres municipaux dès le 18 décembre 1965. Vient ensuite un devis de M. Gervasoni, architecte à Bellegarde, montant à 49.350 francs (4 février 1967). Par ailleurs certaines boiseries du chœur, en sapin, sont attaquées par la vermine, et le Vatican est dans une période où elle prône de mettre les églises à nues, dans l'esprit de la crèche de Bethléem.

Une délégation de la Commission d'Art Sacré du diocèse de Belley (MM. Brevet, Gonnet, Poncet) se rend à Champfromier le 25 mars 1969. Elle exprime les vœux que l'autel de 1830 soit avancé à la clef de voute, abaissé sur une seule marche et amputé de ses extrémités angulaires pour le réduire à son rectangle central ; que le tabernacle, suivant les souhaits de M. le curé, soit dans le fond de l'abside ; que la table de communion soit déposée (avec aussi autorisation du maire) ; que les boiseries (qui ne sont pas en bon état) soient enlevées ; que le sol du sanctuaire en bois de sapin soit refait en tomettes ; enfin, que la chaire soit déposée car elle prend beaucoup de visibilité dans cette église aux gros piliers carrés. On note, inscrite à l'inventaire, la Vierge (de la chapelle de gauche) en bois doré avec enfant Jésus du côté droit sur un socle, cas rare.

Il est donc décidé de supprimer toutes les boiseries et les ornements du chœur. C'est l’entreprise Barberot, de Bourg-en-Bresse, qui eut la charge des travaux et en particulier la pose des très onéreux carreaux de terre cuite des tuileries de Peronnas du chœur, en remplacement du parquet.

Par rapport à la photo de l'état actuel, manquent le lustre du plafond, la chaire avec son abasson surmontée d'un ange doré musicien (archange Gabriel ?), les panneaux muraux et la corniche faisant le tour du chœur, le grand tableau central et les deux latéraux, et les stalles ainsi que la table de communion (avec son drap blanc brodé derrière), formant séparation entre le chœur et la nef. Manquent aussi (non visible sur la photo) les tableaux du Chemin de Croix. C'est la chaire qui avait le plus de valeur. On ne sait pas ce qu'elle est devenue, pas plus que la belle corniche des panneaux ni le Chemin de Croix. Il n'y a donc plus de chaire mais un nouveau Chemin de Croix, celui actuellement en place, fut racheté ultérieurement, et réalisé avec des émaux dans le Midi de la France.

La photographie aux boiseries semble avoir été prise à l'occasion d'une cérémonie commémorative de la Première guerre mondiale, probablement l'inauguration de la plaque portant les noms des Morts pour la France (actuellement replacée au fond de l'église, avec additif d'une plaque pour la Seconde guerre). Un devis pour cette plaque avait été reçu par la municipalité en date du 23 décembre 1923. Au-dessus de cette plaque, et en d'autres endroits, on remarque la présence de nombreux drapeaux.

Une statue (St-Joseph ?) est visible à travers les boiseries ajourées de la chaire, ou a été placée à l'intérieur afin d'équilibrer la composition de la photographie.

La bannière de gauche est celle de Jean Baptiste, patron du diocèse (?), celle de droite honore Saint Martin, le patron de la paroisse. Le Christ en croix, visible de profil à droite, est maintenant au fond du chœur. St-Antoine de Padoue est maintenant à gauche, après avoir été le premier à droite en entrant dans l'église : "On mettait un sou dans le tronc placé sous sa statue quand on avait perdu un objet, comme ça il nous aidait à le retrouver".

Lorsque les boiseries furent retirées, certaines paroissiennes ne voulurent plus venir à la messe. D'autres sont-elles venues plus nombreuses, en hommage aux murs nus comme à Bethléem  ?

 

Crédit photographique : G. Lancel (photo couleur, 01/04/08). Remerciements : Suzanne Moine (qui a fait don à G. Lancel du cliché pris par son père), Danièle Vallet (exemplaire NB ci-dessus), et pour leurs souvenirs, Antoine et Etienne Prost, Mme Hélène Chevron et de nombreux autres paroissiens.

Dernière mise à jour de cette page, le 16 décembre 2008.

 

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