Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL

Ebéniste (Marius Chapuis)

Marius Chapuis (1878 Lyon - 1961 Champfromier), ancien maire de Champfromier, n'avait que 19 ans en 1897 lorsqu'il revenait de Russie où il avait été opérateur des Frères Lumière ! De retour à Lyon ses parents préférèrent alors orienter leur fils aîné vers un métier moins risqué, et il fit des études d'ébéniste, et pour preuve son grand livre d’ébénisterie de styles de toutes époques qu'il conservera toute sa vie... Ebéniste il fut donc, et il commencera son activité à Lyon, comme on le voit sur une carte photo, au numéro 30 (présumé rue de Jonage, vers 1907/09).


Près de la porte, probablement Marius Chapuis, ses parents et sa sœur (presque cachée)
(Carte photo R. Guilleminot, etc. Paris)

Epoux de Clémentine Martin, sa femme née à Lyon mais de famille champfromérande, Marius Chapuis arrive donc à Champfromier (entre 1926 et 1931) en tant qu'ébeniste, et il habitera la maison de la cousine de Clémentine (Actuelle maison Pinell, 976 rue des Burgondes). Son atelier, situé de l'autre côté de la route (et de la voie du tram) ne fut démoli qu'assez récemment, lors d'aménagements de l'usine MGI Coutier.

En tant qu'ancien professionnel du cinéma, il n'est pas étonnant de retrouver dans les plaques photos personnelles de Marius Chapuis diverses plaques de grand format (9 x 13 cm) de meubles qui furent certainement quelques-unes de ses plus belles œuvres : buffet, entrée de porte, table et comode. Ces plaques inédites sont malheureusement conservées sans aucune annotation.

 
La seconde photo semble prise à Lyon, avec ses parents et sa sœur Lucie (décédée en 1900).
L'entrée de porte de la maison-atelier de ses parents serait-elle sa première réalisation ?


 
Une variante de la photo de gauche présente la table avec un journal titré "La Rive Gauche du Rhône"

Marius Chapuis ne fit pas fortune en réalisant des meubles de style à Champfromier. On assure même qu'il est mort pauvre. Il est vrai qu'à Champfromier on ne faisait pas toujours réaliser des meubles parce que l'on en avait besoin, mais parfois tout simplement parce que l'on avait du bois disponible ! Telle grande famille de Monnetier se souvient après avoir coupé des noyers, on les avaient apportés à Marius pour qu'il en face une chambre à coucher. Mais comme les époux avaient évidemment déjà une chambre, il ne voulurent jamais y coucher. Il attendirent donc qu'un fils se marie pour lui offrir en cadeau de noce ! Telle autre famille d'un hameau disposait aussi d'une chambre à coucher Chapuis. Marius Chapuis lui-même s'était confectionné un buffet en noyer.

Meubles divers

Pami les meubles répertoriés de Marius Chapuis, voici un salle à manger de style Art déco des années 1920-1939, réalisée pour une famille de Champfromier, un remarquable ensemble homogène composé d'un buffet, d'une table et d'un miroir.

  

           

On connaît aussi à Champfromier une horloge-comtoise au mécanisme provenant de Dubois, à Lyon (ci-dessous),

 

ainsi que, une jolie table aux pieds galbés réunis en un imposant motif central escamotable (voir la photo sur plaque ci-dessus) et, non présenté dans ce site, une petite table ronde, un lutrin à Giron, une bibliothèque, une autre sellette, etc.

La rambade en bois des îles...

Parmi les meubles de Chapuis pour partie encore précieusement conservés à Champfromier, mais dont malheureusement aucun n'est signé, certains sont attachés à une histoire du bout du monde ! Marius avait un membre de sa famille, de belle situation, qui demeurait en Inde. Celui-ci avait commandé une rambarde d’escalier pour son habitation, avec dans l'idée de la ramener avec lui à son retour en France. Cette rampe en bois des îles a beaucoup fait parler ; aussi n'a-t-on pas affirmé qu'elle provenait d'un luxueux paquebot desaffecté ! Toujours est-il qu'elle fut effectivement rapportée en France (sans les marches mais avec les contre-marches) et que l'homme décèda peu après. La rampe disposait d'une magnifique chimère (la première et imposante balustre ouvragée au bas de l'escalier), et elle fut alors proposée à un ébéniste lyonnais (Emonet). Ce dernier aurait bien trouvé un usage à cet escalier des Iles, mais seulement s'il avait disposé de deux chimères. Et comme évidemment il n'y avait qu'une seule, le projet ne se réalisa pas. Ce fut finalement Marius Chapuis qui fit l'acquisition de l'ecalier exotique pour le reconvertir, coupé en petits morceaux. Il assembla les balustres et morceaux de main courante, ajouta des plateaux, façonna les parties manquantes de ses projets et réalisa de superbes consoles à deux ou quatre pieds, des commodes renforcées de balutres latéraux et au moins une sellette porte-fleurs !

Ci-dessous, voici deux exemplaires de consoles. Si le plateau est le même et la façade identique avec l'élégant ré-emploi de deux balustres et de la main courante en bois des îles, par contre les parties arrières sont traitées de manière très différentes. A voir aussi, ci-desous, une autre de cette même série de balustres, intégrée dans une jolie sellette porte vase.

 
 

 

 

Pour information, depuis 1980 Champfromier s'honore à nouveau d'un ébéniste de qualité : Voir Michel Bouteraon, 553 rue de la Fruitière.

Remerciements : Plaques photos et carte photo : collection privée. La salle à manger Art déco, l'horloge-comtoise, les deux consoles et la sellete : collections privées (quatre familles).

 

Dernière mise à jour de cette page, le 3 juin 2008.

 

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