Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL |
Curieusement aux temps post-révolutionnaires le filon de la carrière à plâtre, qui se développa ensuite uniquement sur Montanges, n'était connu que sur le territoire de Champfromier, dans une parcelle communale, non loin de Chatey !
Cette ancienne parcelle est facile à identifier (D422 des plans napoléoniens, feuille D2), ayant été vendue par la commune de Champfromier, en 1813. Elle se trouvait en contrebas de Communal, rive gauche de la Sandézanne, dans la partie qui précède la jonction de ce ruisseau avec celui des Sanges. Des tentatives de procédures pour en régulariser les limites excessives, réapparaîtront cinquante années plus tard...
Tout commence en l'an V (fin 1796) avec une lettre signée de Claude-Charles Bornet [Bornet-Marcoz, CI-2363], agent municipal de la commune de Champfromier, adressée aux citoyens administrateurs du département de l'Ain, qui "expose qu'il existe dans la commune et sur le territoire d'icelle, une carrière en plâtre au lieu appelé Aux Côtes de Chatez, sur le nand de Communal (la Sandézanne), que cette carrière produit du plâtre blanc et gris, que des étrangers s'avisent impunément d'arracher du plâtre pour le revendre sans que la commune en reçoive aucune rétribution, que les étrangers l'arrachent sans précautions, détruisent la carrière et dénaturent le communal, ce qui porte le plus grand préjudice ; qu'elle seroit susceptible d'être amodiée à un homme de l'art qui en donneroit une somme assez considérable, pour pourvoir aux besoins de la commune, soit pour payer annuellement les dépenses locales, soit pour payer les contributions foncières des communaux qui sont assez considérables, n'y ayant d'autre revenus que celui-là pour pouvoir les payer". La lettre se termine par la demande officielle d'autorisation d'amodiation de ladite carrière.
Le 5 nivôse an V (25/12/1796), les membres de l'administration municipale du canton de Châtillon-de-Michaille reprennent l'exposé concernant la carrière et autorisent la commune à une demande d'amodiation, ce qui est confirmé quelques jours plus tard, avec mention que des affiches de l'adjudication de l'amodiation seront placées dans toutes les communes de l'arrondissement du canton concerné.
Le 25 nivôse an V (14/01/1797), les membres de l'administration municipale du Canton de Châtillon, considérant cette pétition dont elle reprend les arguments mot pour mot, considérant aussi que "la commune de Champfromier n'a aucun revenu..., que les salaires des garde-champêtres et des garde-bois, les dépenses locales et la contribution foncière imposée sur les communaux sont assez considérables", emet un avis favorable à une amodiation pour 6 ans, au plus offrant et dernier enchérisseur après pose d'affiches.
Après autorisations administratives, l'adjudication se déroule le 9 ventôse an V (27/02/1797). Claude-François Grizard [CI-1835], cultivateur à Champfromier, lance les enchères avec 25 francs, et signe. Antoine Panet, citoyen de Châtillon, propose 30 livres (francs). Et les enchères montent entre ces deux enchérisseurs, 35, 40, 45, 50, 60, 70, 80, et enfin 100 livres par ledit Panet, sans plus que personne comparaisse alors qu'il est six heures de relevée. Les membres amodient donc la carrière de plâtre audit Panet pour la redevance annuelle de 100 livres,
Le 9 ventôse an V républicain (27/02/1797), le registre des adjudication du Canton de Châtillon-de-Michaille rapporte que le "bail à ferme de la carrière en plâtre située sur le territoire de Champfromier, lieu appelé Aux Côtes de Chatey" va être tranché au plus offrant et dernier enchérisseur, pour 6 années, conformément aux affiches. Claude-François Grizard, cultivateur de Champfromier, en offre en premier 25 francs (annuellement). Lui répond un sieur Panet de Châtillon (Antoine Panet, marchand patenté) qui monte à 30 livres (francs), et chacun enchérit successivement, 35, 40, 45, 50, 60, 70, 80, et enfin 100 livres pour le sieur Panet qui remporte l'adjudication et devra donc payer cette somme chaque année au receveur de la commune de Champfromier, en se conformant aux conditions énumérées préalablement en 5 articles, sans particularités. Le citoyen présente alors une caution de Me Baudin, notaire à Châtillon, qui est donc engagé solidairement. Les pièces suivantes concernent les procédures habituelles d'homologation de l'adjudication pour qu'elle porte son plein effet.
Sans surprise, ledit Antoine Panet, marchand patenté de Châtillon, demande-t-il à ce que le bail soit homologué, ce qui lui est accordé [Extrait du registre des adjudications du Canton de Châtillon ; AD01, 2L251 (voir aussi une version notariale, chez le notaire Baudin caution (3 E14415, an5, n° 11)].
Recherchant des fonds, la commune propose en 1806 d'amodier (de louer) des communaux et la carrière (qui est bien la même, puisque dite sous Communal, mais avec un toponyme inédit (Champ Maillet) : "4°) La carrière d’où l’on tire des pierres propres à faire du plâtre, située sous les finages de Communal, proche Champ Maillet, évalué 46 francs". Les enchères montent assez bien puisque "la carrière d’où l’on extrait le gypse, a été adjugée à Pierre Ducrest [Probablement Pierre-Joseph, CI-2736], meunier demeurant au Pont d’Enfer, pour la somme de 60 francs par an (pour 3 ans)" [RD07, f° 48v (06/02/1806) et f° 50 (18/05/1806)].
Cette carrière sera vendue par la commune de Champfromier en 1813.
Première publication le 22 avril 2015. Dernière mise à jour de cette page, le 09/12/2023.