| Patrimoine et Histoire de Champfromier, par Ghislain LANCEL |
Le plus ancien abergement de Chalam aux Montangers date de 1439. Plus de trois siècles plus tard, la Révolution est passée, mais cette ancestrale possession de Montanges accordée par le prieur de Nantua sur le territoire de Champfromier n'est pas remise en cause. En 1794, avec plus d'un an d'avance, les habitants de Montanges mettent aux enchères le prochain bail, lesquelles ont lieu au "Temple" (entendons l'église) de Montanges !
L'adjudication du 21 fructidor an II (7 septembre 1794), faite au temple de Montanges, pour 6 ans à compter du premier floréal an IV (20 avril 1796), est remportée par Jean-Baptiste Delaville, pour un montant de 1.200 livres de rente annuelle. Notons qu'il est évident que ce Jean-Baptiste Delaville, dernier représentant mâle de la lignée des Delaville, ne s'est porté enchérisseur que dans l'idée de sous-amodier ce bail, peut-être à Claude-Joseph Berrod cultivateur à Montanges qui se rend caution solidaire.
L'acte notarié qui consigne cette adjudication du domaine de Chalam nous permet de connaître la réglementation préalable exprimée en une douzaine de "conditions", essentiellement des interdictions et des devoirs, sans que l'on sache vraiment de quelle ressource principale le fermier pouvait espérer en tirer un quelconque bénéfice... Quelques mentions surprennent, ainsi le preneur ne pourra "tirer ni faire tirer aucune poix ni térébenthine des arbres sapins" ! Il devra par contre entretenir le chemin d'accès "entretiendra le chemin de la maison de Chalame jusqu’au domaine des Sauges [Chemin du Tamiset], en sorte que les habitants puissent sans danger descendre les bois de ladite forêt".
[f° 8604 ] Le 21 fructidor an II (7 septembre 1794) , furent présents Jean-Baptiste et Marc-Antoine Louverier [... on relève plus d’une page de noms, et d’autres en renvoi] [f° 8604v ] (...), lesquels disent qu’ils ont fait avertir dans toutes les communes voisines que ce jourd’hui il serait procédé à l’adjudication et amodiation dudit domaine de Chalame, dans le temple de la divinité dudit Montange, lequel bail sera fait sous les conditions suivantes :
1) Que le fermier sera tenu d’entretenir les bâtiments dudit domaine et les clôtures ;
2) Qu’il habitera les bâtiments pendant toute l’année, tant pour leur conservation que pour réparer les détériorations qui pourraient survenir des coups de vent, et autrement pour veiller à la conservation et à la garde de la forêt dudit domaine ; qu’il cultivera les terres suivant l’usage et entretiendra le chemin de la maison de Chalame jusqu’au domaine des Sauges, en sorte que les habitants puissent sans danger descendre les bois de ladite forêt ;
3) Qu’il ne pourra tirer ni faire tirer aucune poix [f° 8605] ni térébenthine des arbres sapins ;
4) Que les habitants de la communauté auront la liberté de faire paître dans ladite forêt leurs chevaux et bœufs lorsqu’ils iront voiturer leurs bois nécessaires pour leurs usages ;
5) Que le présent bail demeurera résilié de plein droit, sans être obligé de recourir à aucune formalité, à défaut de payement du prix du présent bail, qui sera payé en deux termes égaux, à savoir le premier le 30 brumaire de la quatrième année Républicaine (21/11/1795) et le second le 30 prairial de la même année (18/06/1796), entre les mains d’un trésorier que les propriétaires se choisirons et nommerons à cet effet, à commencer la jouissance dudit domaine au premier floréal de ladite année IV (20/04/1796) et finira après six prises et levées perçues (6 années) ;
7) [Lire : 6°)] Que ledit fermier jouira dudit héritage en bon père de famille, sans pouvoir distraire (aucun) fourrage ni engrais et bois, veillera à la conservation des bois de ladite communauté, donnera avis sur le champ à leurdit trésorier des dégradations qui viendront à sa connaissance, et dans le cas où il favoriserait les dégradations ou serait leur complice, il sera responsable des délits en son propre et privé nom ;
8) Que pour le chauffage du fermier et [f° 8605v] le besoin dudit domaine, même pour les clôtures, il ne pourra se servir que des queues et branches des arbres qui auront été laissées dans la forêt, et au défaut desdits bois coupés il lui sera marqué des bois de non valeur ;
9) Qu’il payera tous les frais ainsi que 18 livres en sus du présent bail ;
10) qu’il payera chaque année, outre le prix du bail, 12 paquets de tavaillons, faits à l’usage de l’endroit, lesquels il rendra à ses frais à Monestier,et à cet effet il lui sera marqué chaque année les arbres qu’il lui faudra pour les faire, ainsi que pour l’entretien des bâtiments dudit domaine ;
11) Sera tenu, ledit adjudicataire, de remplacer les clôtures par les limites pour séparer les héritages d’avec ceux des voisins ;
12) Sera tenu ledit preneur de faire à ses frais dans le courant de la première année un four à chaux de 10 pieds, les propriétaires lui marquant les bois nécessaires pour le cuire ; sera chargé de plus de délivrer les pâturages et ne pourra (... ?), excepté le feu du ciel sur les bâtiments [f° 8606] ;
13) Que le preneur ne pourra tenir aucune chèvre dans la susdite montagne ;
Et est comparu le citoyen Jean-Baptiste Delaville, qui a promis payer la rente annuelle de 1.000 livres et a signé [Signature : Delaville (puis enchères Laurent Berrod à 1.110 livres, Pierre-Joseph Buffard maire à 1.120 livres, Claude-Joseph Berrod à 1.160 livres], et à nouveau le citoyen Jean-Baptiste Delaville à 1.200 livres, [f° 8606v] dernière enchère, et à comparu le citoyen Claude-Joseph Berrod cultivateur à Montange qui se rend caution solidaire.
Passé audit Montange, dans le susdit temple, en présence de Joseph Cartant cultivateur demeurant à Chézery et Martin [CI-2575 ?] Tavernier cultivateur demeurant à Champfromier, et ledit Tavernier a signé [(plus de 30 signatures, dont Delaville, Buffard maire, Taverniée et Guillermet notaire public].
Récapitulatif des amodiations de Chalam.
Source : AD01, 3E14323, f° 8604.
Première publication, le 29 janvier 2014. Dernière mise à jour de cette page, idem.